Leprintemps de tes yeux De regret en regret Je cours aprĂšs nous deux Je ne pourrai jamais T'effacer de ma vie Alors je cours aprĂšs Ce que tu m'avais dit Notre amour est mort Tu m'avais dit "Nous deux" Et moi je te croyais Tu m'avais dit "Je veux" Et moi je te voulais Tu m'avais dit "Je t'aime" Et tu m'as fait l'amour Tu m'avais dit "Je t'aime"
Toitu m'avais choisie, j'Ă©tais ta reine. De la fĂȘte Italienne. A la primavera, oĂč tu m'avais dit je t'aime. A la primavera, j'avais quinze ans Ă peine. La primavera, le printemps de ma vie, En Italie. Il y avait mes frĂšres, mon oncle LĂ©on. Tout le monde
Parolesde la chanson Marjolaine par Francis Lemarque Un inconnu et sa guitare Dans une rue pleine de brouillard Chantait, chantait une chanson Que répétaient deux autres compagnons Marjolaine, toi si jolie Marjolaine, le printemps fleurit Marjolaine, j'étais soldat Mais aujourd'hui Je reviens prÚs de toi Tu m'avais dit : "Je t'attendrai"
PascalObispo Paroles de « Tu m'avais dit »: Il Ă©tait minuit passĂ© / Quand on est tombĂ© d'accord / Tu t'occuperais de Deutsch English Español Français Hungarian Italiano Nederlands Polski PortuguĂȘs (Brasil) RomĂąnÄ Svenska TĂŒrkçe ÎλληΜÎčÎșÎŹ ĐŃлгаŃŃĐșĐž Đ ŃŃŃĐșĐžĐč ĐĄŃĐżŃĐșĐž ۧÙŰč۱ۚÙŰ© ÙŰ§Ű±ŰłÛ æ„æŹ
Envoyéle: samedi 12 juillet 2008 17:02 Inscrit le: 22/10/2006 Messages: 4 573: Bonjour que de trésors pour tous qui ont la chance de les avoir conservés De mon coté, c'est vraiment le vide complet à part une photo du frÚre de ma GM que j'avais oublié de noter pour demander son livret matricule aux AD Bonne fin de journée à tous et encore merci à tous ceux qui postent leurs
AboutPrintemps, tu m'avais dit Song. Listen to Loig Morin Printemps, tu m'avais dit MP3 song. Printemps, tu m'avais dit song from the album Printemps is released on Apr 2021. The duration of song is 03:53. This song is sung by Loig Morin. Related Tags -
Ajoutde la chanson «Tu m'avais dit» (Alice et Moi)
Marjolaine le printemps fleurit Marjolaine, j'étais soldat Mais aujourd'hui Je reviens prÚs de toi Tu m'avais dit: "Je t'attendrai" Je t'avais dit: "Je reviendrai" J'étais parti encore enfant Suis revenu un homme maintenant Marjolaine, toi si jolie Marjolaine, je n'ai pas menti Marjolaine, j'étais soldat Mais aujourd'hui Je reviens prÚs de toi J'étais parti pour dix années Mais dix
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Ferat 1918 CALLIGRAMMES, portrait de lâauteur gravĂ© par Gaudon dâaprĂšs un dessin de Picasso 1918 LE FLĂNEUR DES DEUX RIVES 1919 ĆUVRES POSTHUMES AUX ĂDITIONS DE LA NOUVELLE REVUE FRANĂAISE LA FEMME ASSISE, roman 1920 GUILLAUME APOLLINAIRE ALCOOLS 1898 POĂMES 1913 TROISIĂME ĂDITION nrf PARIS ĂDITIONS DE LA NOUVELLE REVUE FRANĂAISE 35 ET 37, RUE MADAME, 1920 Tous droits de reproduction et de traduction rĂ©servĂ©s pour tous pays y compris la RussieCopyright by librairie Gallimard 1920 ZONE Ă la fin tu es las de ce monde ancien BergĂšre ĂŽ tour Eiffel le troupeau des ponts bĂȘle ce matin Tu en as assez de vivre dans lâantiquitĂ© grecque et romaine Ici mĂȘme les automobiles ont lâair dâĂȘtre anciennes La religion seule est restĂ©e toute neuve la religion Est restĂ©e simple comme les hangars de Port-Aviation Seul en Europe tu nâes pas antique ĂŽ Christianisme LâEuropĂ©en le plus moderne câest vous Pape Pie X Et toi que les fenĂȘtres observent la honte te retient Dâentrer dans une Ă©glise et de tây confesser ce matin Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent tout haut VoilĂ la poĂ©sie ce matin et pour la prose il y a les journaux Il y a les livraisons Ă 25 centimes pleines dâaventures policiĂšres Portraits des grands hommes et mille titres divers Jâai vu ce matin une jolie rue dont jâai oubliĂ© le nom Neuve et propre du soleil elle Ă©tait le clairon Les directeurs les ouvriers et les belles stĂ©no-dactylographes Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent Le matin par trois fois la sirĂšne y gĂ©mit Une cloche rageuse y aboie vers midi Les inscriptions des enseignes et des murailles Les plaques les avis Ă la façon des perroquets criaillent Jâaime la grĂące de cette rue industrielle SituĂ©e Ă Paris entre la rue Aumont-ThiĂ©ville et lâavenue des Ternes VoilĂ la jeune rue et tu nâes encore quâun petit enfant Ta mĂšre ne tâhabille que de bleu et de blanc Tu es trĂšs pieux et avec le plus ancien de tes camarades RenĂ© Dalize Vous nâaimez rien tant que les pompes de lâĂglise Il est neuf heures le gaz est baissĂ© tout bleu vous sortez du dortoir en cachette Vous priez toute la nuit dans la chapelle du collĂšge Tandis quâĂ©ternelle et adorable profondeur amĂ©thyste Tourne Ă jamais la flamboyante gloire du Christ Câest le beau lys que tous nous cultivons Câest la torche aux cheveux roux que nâĂ©teint pas le vent Câest le fils pĂąle et vermeil de la douloureuse mĂšre Câest lâarbre toujours touffu de toutes les priĂšres Câest la double potence de lâhonneur et de lâĂ©ternitĂ© Câest lâĂ©toile Ă six branches Câest Dieu qui meurt le vendredi et ressuscite le dimanche Câest le Christ qui monte au ciel mieux que les aviateurs Il dĂ©tient le record du monde pour la hauteur Pupille Christ de lâĆil VingtiĂšme pupille des siĂšcles il sait y faire Et changĂ© en oiseau ce siĂšcle comme JĂ©sus monte dans lâair Les diables dans les abĂźmes lĂšvent la tĂȘte pour le regarder Ils disent quâil imite Simon Mage en JudĂ©e Ils crient sâil sait voler quâon lâappelle voleur Les anges voltigent autour du joli voltigeur Icare Enoch Elie Apollonius de Thyane Flottent autour du premier aĂ©roplane Ils sâĂ©cartent parfois pour laisser passer ceux que transporte la Sainte-Eucharistie Ces prĂȘtres qui montent Ă©ternellement en Ă©levant lâhostie Lâavion se pose enfin sans refermer les ailes Le ciel sâemplit alors de millions dâhirondelles Ă tire-dâaile viennent les corbeaux les faucons les hiboux DâAfrique arrivent les ibis les flamands les marabouts Lâoiseau Roc cĂ©lĂ©brĂ© par les conteurs et les poĂštes Plane tenant dans les serres le crĂąne dâAdam la premiĂšre tĂȘte Lâaigle fond de lâhorizon en poussant un grand cri Et dâAmĂ©rique vient le petit colibri De Chine sont venus les pihis longs et souples Qui nâont quâune seule aile et qui volent par couples Puis voici la colombe esprit immaculĂ© Quâescortent lâoiseau-lyre et le paon ocellĂ© Le phĂ©nix ce bĂ»cher qui soi-mĂȘme sâengendre Un instant voile tout de son ardente cendre Les sirĂšnes laissant les pĂ©rilleux dĂ©troits Arrivent en chantant bellement toutes trois Et tous aigle phĂ©nix et pihis de la Chine Fraternisent avec la volante machine Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule Des troupeaux dâautobus mugissants prĂšs de toi roulent Lâangoisse de lâamour te serre le gosier Comme si tu ne devais jamais plus ĂȘtre aimĂ© Si tu vivais dans lâancien temps tu entrerais dans un monastĂšre Vous avez honte quand vous vous surprenez Ă dire une priĂšre Tu te moques de toi et comme le feu de lâEnfer ton rire pĂ©tille Les Ă©tincelles de ton rire dorent le fonds de ta vie Câest un tableau pendu dans un sombre musĂ©e Et quelquefois tu vas la regarder de prĂšs Aujourdâhui tu marches dans Paris les femmes sont ensanglantĂ©es CâĂ©tait et je voudrais ne pas mâen souvenir câĂ©tait au dĂ©clin de la beautĂ© EntourĂ©e de flammes ferventes Notre-Dame mâa regardĂ© Ă Chartres Le sang de votre SacrĂ©-CĆur mâa inondĂ© Ă Montmartre Je suis malade dâouĂŻr les paroles bienheureuses Lâamour dont je souffre est une maladie honteuse Et lâimage qui te possĂšde te fait survivre dans lâinsomnie et dans lâangoisse Câest toujours prĂšs de toi cette image qui passe Maintenant tu es au bord de la MĂ©diterranĂ©e Sous les citronniers qui sont en fleur toute lâannĂ©e Avec tes amis tu te promĂšnes en barque Lâun est Nissard il y a un Mentonasque et deux Turbiasques Nous regardons avec effroi les poulpes des profondeurs Et parmi les algues nagent les poissons images du Sauveur Tu es dans le jardin dâune auberge aux environs de Prague Tu te sens tout heureux une rose est sur la table Et tu observes au lieu dâĂ©crire ton conte en prose La cĂ©toine qui dort dans le cĆur de la rose ĂpouvantĂ© tu te vois dessinĂ© dans les agates de Saint-Vit Tu Ă©tais triste Ă mourir le jour oĂč tu tây vis Tu ressembles au Lazare affolĂ© par le jour Les aiguilles de lâhorloge du quartier juif vont Ă rebours Et tu recules aussi dans ta vie lentement En montant au Hradchin et le soir en Ă©coutant Dans les tavernes chanter des chansons tchĂšques Te voici Ă Marseille au milieu des pastĂšques Te voici Ă Coblence Ă lâhĂŽtel du GĂ©ant Te voici Ă Rome assis sous un nĂ©flier du Japon Te voici Ă Amsterdam avec une jeune fille que tu trouves belle et qui est laideElle doit se marier avec un Ă©tudiant de Leyde On y loue des chambres en latin Cubicula locanda Je mâen souviens jây ai passĂ© trois jours et autant Ă Gouda Tu es Ă Paris chez le juge dâinstruction Comme un criminel on te met en Ă©tat dâarrestation Tu as fait de douloureux et de joyeux voyages Avant de tâapercevoir du mensonge et de lâĂąge Tu as souffert de lâamour Ă vingt et Ă trente ans Jâai vĂ©cu comme un fou et jâai perdu mon temps Tu nâoses plus regarder tes mains et Ă tous moments je voudrais sangloter Sur toi sur celle que jâaime sur tout ce qui tâa Ă©pouvantĂ© Tu regardes les yeux pleins de larmes ces pauvres Ă©migrants Ils croient en Dieu ils prient les femmes allaitent des enfants Ils emplissent de leur odeur le hall de la gare Saint-Lazare Ils ont foi dans leur Ă©toile comme les rois-mages Ils espĂšrent gagner de lâargent dans lâArgentine Et revenir dans leur pays aprĂšs avoir fait fortune Une famille transporte un Ă©dredon rouge comme vous transportez votre cĆurCet Ă©dredon et nos rĂȘves sont aussi irrĂ©els Quelques-uns de ces Ă©migrants restent ici et se logent Rue des Rosiers ou rue des Ăcouffes dans des bouges Je les ai vus souvent le soir ils prennent lâair dans la rue Et se dĂ©placent rarement comme les piĂšces aux Ă©checs Il y a surtout des Juifs leurs femmes portent perruque Elles restent assises exsangues au fond des boutiques Tu es debout devant le zinc dâun bar crapuleux Tu prends un cafĂ© Ă deux sous parmi les malheureux Tu es la nuit dans un grand restaurant Ces femmes ne sont pas mĂ©chantes elles ont des soucis cependantToutes mĂȘme la plus laide a fait souffrir son amant Elle est la fille dâun sergent de ville de Jersey Ses mains que je nâavais pas vues sont dures et gercĂ©es Jâai une pitiĂ© immense pour les coutures de son ventre Jâhumilie maintenant Ă une pauvre fille au rire horrible ma bouche Tu es seul le matin va venir Les laitiers font tinter leurs bidons dans les rues La nuit sâĂ©loigne ainsi quâune belle MĂ©tive Câest Ferdine la fausse ou LĂ©a lâattentive Et tu bois cet alcool brĂ»lant comme ta vie Ta vie que tu bois comme une eau-de-vie Tu marches vers Auteuil tu veux aller chez toi Ă pied Dormir parmi tes fĂ©tiches dâOcĂ©anie et de GuinĂ©e Ils sont des Christ dâune autre forme et dâune autre croyanceCe sont les Christ infĂ©rieurs des obscures espĂ©rances Adieu Adieu Soleil cou coupĂ© LE PONT MIRABEAU Sous le pont Mirabeau coule la Seine Et nos amours Faut-il quâil mâen souvienne La joie venait toujours aprĂšs la peine Vienne la nuit sonne lâheure Les jours sâen vont je demeure Les mains dans les mains restons face Ă face Tandis que sous Le pont de nos bras passe Des Ă©ternels regards lâonde si lasse Vienne la nuit sonne lâheure Les jours sâen vont je demeure Lâamour sâen va comme cette eau courante Lâamour sâen va Comme la vie est lente Et comme lâEspĂ©rance est violente Vienne la nuit sonne lâheure Les jours sâen vont je demeure Passent les jours et passent les semaines Ni temps passĂ© Ni les amours reviennent Sous le pont Mirabeau coule la Seine Vienne la nuit sonne lâheure Les jours sâen vont je demeure LA CHANSON DU MAL-AIMĂ Ă Paul LĂ©autaud Et je chantais cette romance En 1903 sans savoir Que mon amour Ă la semblance Du beau PhĂ©nix sâil meurt un soir Le Matin voit sa renaissance Un soir de demi-brume Ă Londres Un voyou qui ressemblait Ă Mon amour vint Ă ma rencontre Et le regard quâil me jeta Me fit baisser les yeux de honte Je suivis ce mauvais garçon Qui sifflotait mains dans les poches Nous semblions entre les maisons Onde ouverte de la mer Rouge Lui les HĂ©breux moi Pharaon Que tombent ces vagues de briques Si tu ne fus pas bien aimĂ©e Je suis le souverain dâĂgypte Sa sĆur-Ă©pouse son armĂ©e Si tu nâes pas lâamour unique Au tournant dâune rue brĂ»lant De tous les feux de ses façades Plaies du brouillard sanguinolent OĂč se lamentaient les façades Une femme lui ressemblant CâĂ©tait son regard dâinhumaine La cicatrice Ă son cou nu Sortit saoule dâune taverne Au moment oĂč je reconnus La faussetĂ© de lâamour mĂȘme Lorsquâil fut de retour enfin Dans sa patrie le sage Ulysse Son vieux chien de lui se souvint PrĂšs dâun tapis de haute lisse Sa femme attendait quâil revĂźnt LâĂ©poux royal de Sacontale Las de vaincre se rĂ©jouit Quand il la retrouva plus pĂąle Dâattente et dâamour yeux pĂąlis Caressant sa gazelle mĂąle Jâai pensĂ© Ă ces rois heureux Lorsque le faux amour et celle Dont je suis encore amoureux Heurtant leurs ombres infidĂšles Me rendirent si malheureux Regrets sur quoi lâenfer se fonde Quâun ciel dâoubli sâouvre Ă mes vĆux Pour son baiser les rois du monde Seraient morts les pauvres fameux Pour elle eussent vendu leur ombre Jâai hivernĂ© dans mon passĂ© Revienne le soleil de PĂąques Pour chauffer un cĆur plus glacĂ© Que les quarante de SĂ©baste Moins que ma vie martyrisĂ©e Mon beau navire ĂŽ ma mĂ©moire Avons-nous assez naviguĂ© Dans une onde mauvaise Ă boire Avons-nous assez divaguĂ© De la belle aube au triste soir Adieu faux amour confondu Avec la femme qui sâĂ©loigne Avec celle que jâai perdue LâannĂ©e derniĂšre en Allemagne Et que je ne reverrai plus Voie lactĂ©e ĂŽ sĆur lumineuse Des blancs ruisseaux de Chanaan Et des corps blancs des amoureuses Nageurs morts suivrons-nous dâahan Ton cours vers dâautres nĂ©buleuses Je me souviens dâune autre annĂ©e CâĂ©tait lâaube dâun jour dâavril Jâai chantĂ© ma joie bien-aimĂ©e ChantĂ© lâamour Ă voix virile Au moment dâamour de lâannĂ©e AUBADE CHANTĂE Ă LĂTARE, UN AN PASSĂ Câest le printemps viens-tâen PĂąquette Te promener au bois joli Les poules dans la cour caquĂštent Lâaube au ciel fait de roses plis Lâamour chemine Ă ta conquĂȘte Mars et VĂ©nus sont revenus Ils sâembrassent Ă bouches folles Devant des sites ingĂ©nus OĂč sous les roses qui feuillolent De beaux dieux roses dansent nus Viens ma tendresse est la rĂ©gente De la floraison qui paraĂźt La nature est belle et touchante Pan sifflote dans la forĂȘt Les grenouilles humides chantent Beaucoup de ces dieux ont pĂ©ri Câest sur eux que pleurent les saules Le grand Pan lâamour JĂ©sus-Christ Sont bien morts et les chats miaulent Dans la cour je pleure Ă Paris Moi qui sais des lais pour les reines Les complaintes de mes annĂ©es Des hymnes dâesclave aux murĂšnes La romance du mal-aimĂ© Et des chansons pour les sirĂšnes Lâamour est mort jâen suis tremblant Jâadore de belles idoles Les souvenirs lui ressemblant Comme la femme de Mausole Je reste fidĂšle et dolent Je suis fidĂšle comme un dogue Au maĂźtre le lierre au tronc Et les Cosaques Zaporogues Ivrognes pieux et larrons Aux steppes et au dĂ©calogue Portez comme un joug le Croissant Quâinterrogent les astrologues Je suis le Sultan tout-Puissant Ă mes Cosaques Zaporogues Votre Seigneur Ă©blouissant Devenez mes sujets fidĂšles Leur avait Ă©crit le Sultan Ils rirent Ă cette nouvelle Et rĂ©pondirent Ă lâinstant Ă la lueur dâune chandelle RĂPONSE DES COSAQUES ZAPOROGUES AU SULTAN DE CONSTANTINOPLE Plus criminel que Barrabas Cornu comme les mauvais anges Quel BelzĂ©buth es-tu lĂ -bas Nourri dâimmondice et de fange Nous nâirons pas Ă tes sabbats Poisson pourri de Salonique Long collier des sommeils affreux Dâyeux arrachĂ©s Ă coup de pique Ta mĂšre fit un pet foireux Et tu naquis de sa colique Bourreau de Podolie Amant Des plaies des ulcĂšres des croĂ»tes Groin de cochon cul de jument Tes richesses garde-les toutes Pour payer tes mĂ©dicaments Voie lactĂ©e ĂŽ sĆur lumineuse Des blancs ruisseaux de Chanaan Et des corps blancs des amoureuses Nageurs morts suivrons-nous dâahan Ton cours vers dâautres nĂ©buleuses Regret des yeux de la putain Et belle comme une panthĂšre Amour vos baisers florentins Avaient une saveur amĂšre Qui a rebutĂ© nos destins Ses regards laissaient une traĂźne DâĂ©toiles dans les soirs tremblants Dans ses yeux nageaient les sirĂšnes Et nos baisers mordus sanglants Faisaient pleurer nos fĂ©es marraines Mais en vĂ©ritĂ© je lâattends Avec mon cĆur avec mon Ăąme Et sur le pont des Reviens-tâen Si jamais revient cette femme Je lui dirai Je suis content Mon cĆur et ma tĂȘte se vident Tout le ciel sâĂ©coule par eux Ă mes tonneaux des DanaĂŻdes Comment faire pour ĂȘtre heureux Comme un petit enfant candide Je ne veux jamais lâoublier Ma colombe ma blanche rade Ă marguerite exfoliĂ©e Mon Ăźle au loin ma DĂ©sirade Ma rose mon giroflier Les satyres et les pyraustes Les Ă©gypans les feux follets Et les destins damnĂ©s ou faustes La corde au cou comme Ă Calais Sur ma douleur quel holocauste Douleur qui doubles les destins La licorne et le capricorne Mon Ăąme et mon corps incertain Te fuient ĂŽ bĂ»cher divin quâornent Des astres des fleurs du matin Malheur dieu pĂąle aux yeux dâivoire Tes prĂȘtres fous tâont-ils parĂ© Tes victimes en robe noire Ont-elles vainement pleurĂ© Malheur dieu quâil ne faut pas croire Et toi qui me suis en rampant Dieu de mes dieux morts en automne Tu mesures combien dâempans Jâai droit que la terre me donne Ă mon ombre ĂŽ mon vieux serpent Au soleil parce que tu lâaimes Je tâai menĂ©e souviens-tâen bien TĂ©nĂ©breuse Ă©pouse que jâaime Tu es Ă moi en nâĂ©tant rien Ă mon ombre en deuil de moi-mĂȘme Lâhiver est mort tout enneigĂ© On a brĂ»lĂ© les ruches blanches Dans les jardins et les vergers Les oiseaux chantent sur les branches Le printemps clair lâavril lĂ©ger Mort dâimmortels argyraspides La neige aux boucliers dâargent Fuit les dendrophores livides Du printemps cher aux pauvres gens Qui resourient les yeux humides Et moi jâai le cĆur aussi gros Quâun cul de dame damascĂšne Ă mon amour je tâaimais trop Et maintenant jâai trop de peine Les sept Ă©pĂ©es hors du fourreau Sept Ă©pĂ©es de mĂ©lancolie Sans morfil ĂŽ claires douleurs Sont dans mon cĆur et la folie Veut raisonner pour mon malheur Comment voulez-vous que jâoublie LES SEPT ĂPEES La premiĂšre est toute dâargent Et son nom tremblant câest PĂąline Sa lame un ciel dâhiver neigeant Son destin sanglant gibeline Vulcain mourut en la forgeant La seconde nommĂ©e Noubosse Est un bel arc-en-ciel joyeux Les dieux sâen servent Ă leurs noces Elle a tuĂ© trente BĂ©-Rieux Et fut douĂ©e par Carabosse La troisiĂšme bleu fĂ©minin Nâen est pas moins un chibriape AppelĂ© Lul de Faltenin Et que porte sur une nappe LâHermĂšs Ernest devenu nain La quatriĂšme MalourĂšne Est un fleuve vert et dorĂ© Câest le soir quand les riveraines Y baignent leurs corps adorĂ©s Et des chants de rameurs sây traĂźnent La cinquiĂšme Sainte-Fabeau Câest la plus belle des quenouilles Câest un cyprĂšs sur un tombeau OĂč les quatre vents sâagenouillent Et chaque nuit câest un flambeau La sixiĂšme mĂ©tal de gloire Câest lâami aux si douces mains Dont chaque matin nous sĂ©pare Adieu voilĂ votre chemin Les coqs sâĂ©puisaient en fanfares Et la septiĂšme sâextĂ©nue Une femme une rose morte Merci que le dernier venu Sur mon amour ferme la porte Je ne vous ai jamais connue Voie lactĂ©e ĂŽ sĆur lumineuse Des blancs ruisseaux de Chanaan Et des corps blancs des amoureuses Nageurs morts suivrons-nous dâahan Ton cours vers dâautres nĂ©buleuses Les dĂ©mons du hasard selon Le chant du firmament nous mĂšnent Ă sons perdus leurs violons Font danser notre race humaine Sur la descente Ă reculons Destins destins impĂ©nĂ©trables Rois secouĂ©s par la folie Et ces grelottantes Ă©toiles De fausses femmes dans vos lits Aux dĂ©serts que lâhistoire accable Luitpold le vieux prince rĂ©gent Tuteur de deux royautĂ©s folles Sanglote-t-il en y songeant Quand vacillent les lucioles Mouches dorĂ©es de la Saint-Jean PrĂšs dâun chĂąteau sans chĂątelaine La barque aux barcarols chantants Sur un lac blanc et sous lâhaleine Des vents qui tremblent au printemps Voguait cygne mourant sirĂšne Un jour le roi dans lâeau dâargent Se noya puis la bouche ouverte Il sâen revint en surnageant Sur la rive dormir inerte Face tournĂ©e au ciel changeant Juin ton soleil ardente lyre BrĂ»le mes doigts endoloris Triste et mĂ©lodieux dĂ©lire Jâerre Ă travers mon beau Paris Sans avoir le cĆur dây mourir Les dimanches sây Ă©ternisent Et les orgues de Barbarie Y sanglotent dans les cours grises Les fleurs aux balcons de Paris Penchent comme la tour de Pise Soirs de Paris ivres du gin Flambant de lâĂ©lectricitĂ© Les tramways feux verts sur lâĂ©chine Musiquent au long des portĂ©es De rails leur folie de machines Les cafĂ©s gonflĂ©s de fumĂ©e Crient tout lâamour de leurs tziganes De tous leurs siphons enrhumĂ©s De leurs garçons vĂȘtus dâun pagne Vers toi toi que jâai tant aimĂ©e Moi qui sais des lais pour les reines Les complaintes de mes annĂ©es Des hymnes dâesclave aux murĂšnes La romance du mal-aimĂ© Et des chansons pour les sirĂšnes LES COLCHIQUES Le prĂ© est vĂ©nĂ©neux mais joli en automne Les vaches y paissant Lentement sâempoisonnent Le colchique couleur de cerne et de lilas Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-lĂ ViolĂątres comme leur cerne et comme cet automne Et ma vie pour tes yeux lentement sâempoisonne Les enfants de lâĂ©cole viennent avec fracas VĂȘtus de hoquetons et jouant de lâharmonica Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mĂšres Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupiĂšres Qui battent comme les fleurs battent au vent dĂ©ment Le gardien du troupeau chante tout doucement Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent Pour toujours ce grand prĂ© mal fleuri par lâautomne PALAIS Ă Max Jacob Vers le palais de Rosemonde au fond du RĂȘve Mes rĂȘveuses pensĂ©es pieds nus vont en soirĂ©e Le palais don du roi comme un roi nu sâĂ©lĂšve Des chairs fouettĂ©es de roses de la roseraie On voit venir au fond du jardin mes pensĂ©es Qui sourient du concert jouĂ© par les grenouilles Elles ont envie des cyprĂšs grandes quenouilles Et le soleil miroir des roses sâest brisĂ© Le stigmate sanglant des mains contre les vitres Quel archer mal blessĂ© du couchant le troua La rĂ©sine qui rend amer le vin de Chypre Ma bouche aux agapes dâagneau blanc lâĂ©prouva Sur les genoux pointus du monarque adultĂšre Sur le mai de son Ăąge et sur son trente et un Madame Rosemonde roule avec mystĂšre Ses petits yeux tout ronds pareils aux yeux des Huns Dame de mes pensĂ©es au cul de perle fine Dont ni perle ni cul nâĂ©gale lâorient Qui donc attendez-vous De rĂȘveuses pensĂ©es en marche Ă lâOrient Mes plus belles voisines Toc toc Entrez dans lâantichambre le jour baisse La veilleuse dans lâombre est un bijou dâor cuit Pendez vos tĂȘtes aux patĂšres par les tresses Le ciel presque nocturne a des lueurs dâaiguilles On entra dans la salle Ă manger les narines Reniflaient une odeur de graisse et de graillon On eut vingt potages dont trois couleur dâurine Et le roi prit deux Ćufs pochĂ©s dans du bouillon Puis les marmitons apportĂšrent les viandes Des rĂŽtis de pensĂ©es mortes dans mon cerveau Mes beaux rĂȘves mort-nĂ©s en tranches bien saignantes Et mes souvenirs faisandĂ©s en godiveaux Or ces pensĂ©es mortes depuis des millĂ©naires Avaient le fade goĂ»t des grands mammouths gelĂ©s Les os ou songe-creux venaient des ossuaires En danse macabre aux plis de mon cervelet Et tous ces mets criaient des choses nonpareilles Mais nom de Dieu ! Ventre affamĂ© nâa pas dâoreilles Et les convives mastiquaient Ă qui mieux mieux Ah ! nom de Dieu ! quâont donc criĂ© ces entrecĂŽtes Ces grands pĂątĂ©s ces os Ă moelle et mirotons Langues de feu oĂč sont-elles mes pentecĂŽtes Pour mes pensĂ©es de tous pays de tous les temps CHANTRE Et lâunique cordeau des trompettes marines CRĂPUSCULE Ă Mademoiselle Marie Laurencin FrĂŽlĂ©e par les ombres des morts Sur lâherbe oĂč le jour sâextĂ©nue Lâarlequine sâest mise nue Et dans lâĂ©tang mire son corps Un charlatan crĂ©pusculaire Vante les tours que lâon va faire Le ciel sans teinte est constellĂ© Dâastres pĂąles comme du lait Sur les trĂ©teaux lâarlequin blĂȘme Salue dâabord les spectateurs Des sorciers venus de BohĂȘme Quelques fĂ©es et les enchanteurs Ayant dĂ©crochĂ© une Ă©toile Il la manie Ă bras tendu Tandis que des pieds un pendu Sonne en mesure les cymbales Lâaveugle berce un bel enfant La biche passe avec ses faons Le nain regarde dâun air triste Grandir lâarlequin trismĂ©giste ANNIE Sur la cĂŽte du Texas Entre Mobile et Galveston il y a Un grand jardin tout plein de roses Il contient aussi une villa Qui est une grande rose Une femme se promĂšne souvent Dans le jardin toute seule Et quand je passe sur la route bordĂ©e de tilleuls Nous nous regardons Comme cette femme est mennonite Ses rosiers et ses vĂȘtements nâont pas de boutons Il en manque deux Ă mon veston La dame et moi suivons presque le mĂȘme rite LA MAISON DES MORTS Ă Maurice Raynal SâĂ©tendant sur les cĂŽtĂ©s du cimetiĂšre La maison des morts lâencadrait comme un cloĂźtre Ă lâintĂ©rieur de ses vitrines Pareilles Ă celles des boutiques de modes Au lieu de sourire debout Les mannequins grimaçaient pour lâĂ©ternitĂ© ArrivĂ© Ă Munich depuis quinze ou vingt jours JâĂ©tais entrĂ© pour la premiĂšre fois et par hasard Dans ce cimetiĂšre presque dĂ©sert Et je claquais des dents Devant toute cette bourgeoisie ExposĂ©e et vĂȘtue le mieux possible En attendant la sĂ©pulture Soudain Rapide comme ma mĂ©moire Les yeux se rallumĂšrent De cellule vitrĂ©e en cellule vitrĂ©e Le ciel se peupla dâune apocalypse Vivace Et la terre plate Ă lâinfini Comme avant GalilĂ©e Se couvrit de mille mythologies immobiles Un ange en diamant brisa toutes les vitrines Et les morts mâaccostĂšrent Avec des mines de lâautre monde Mais leur visage et leurs attitudes Devinrent bientĂŽt moins funĂšbres Le ciel et la terre perdirent Leur aspect fantasmagorique Les morts se rĂ©jouissaient De voir leurs corps trĂ©passĂ©s entre eux et la lumiĂšre Ils riaient de leur ombre et lâobservaient Comme si vĂ©ritablement CâeĂ»t Ă©tĂ© leur vie passĂ©e Alors je les dĂ©nombrai Ils Ă©taient quarante-neuf hommes Femmes et enfants Qui embellissaient Ă vue dâĆil Et me regardaient maintenant Avec tant de cordialitĂ© Tant de tendresse mĂȘme Que les prenant en amitiĂ© Tout Ă coup Je les invitai Ă une promenade Loin des arcades de leur maison Et tous bras dessus bras dessous Fredonnant des airs militaires Oui tous vos pĂ©chĂ©s sont absous Nous quittĂąmes le cimetiĂšre Nous traversĂąmes la ville Et rencontrions souvent Des parents des amis qui se joignaient Ă la petite troupe des morts rĂ©cents Tous Ă©taient si gais Si charmants si bien portants Qui bien malin qui aurait pu Distinguer les morts des vivants Puis dans la campagne On sâĂ©parpilla Deux chevau-lĂ©gers nous joignirent On leur fit fĂȘte Ils coupĂšrent du bois de viorne Et de sureau Dont ils firent des sifflets Quâil distribuĂšrent aux enfants Plus tard dans un bal champĂȘtre Les couples mains sur les Ă©paules DansĂšrent au son aigre des cithares Ils nâavaient pas oubliĂ© la danse Ces morts et ces mortes On buvait aussi Et de temps Ă autre une cloche Annonçait quâun nouveau tonneau Allait ĂȘtre mis en perce Une morte assise sur un banc PrĂšs dâun buisson dâĂ©pine-vinette Laissait un Ă©tudiant AgenouillĂ© Ă ses pieds Lui parler de fiançailles Je vous attendrai Dix ans vingt ans sâil le faut Votre volontĂ© sera la mienne Je vous attendrai Toute votre vie RĂ©pondait la morte Des enfants De ce monde ou bien de lâautre Chantaient de ces rondes Aux paroles absurdes et lyriques Qui sans doute sont les restes Des plus anciens monuments poĂ©tiques De lâhumanitĂ© LâĂ©tudiant passa une bague Ă lâannulaire de la jeune morte Voici le gage de mon amour De nos fiançailles Ni le temps ni lâabsence Ne nous feront oublier nos promesses Et un jour nous aurons une belle noce Des touffes de myrte Ă nos vĂȘtements et dans vos cheveux Un beau sermon Ă lâĂ©glise De longs discours aprĂšs le banquet Et de la musique De la musique Nos enfants Dit la fiancĂ©e Seront plus beaux plus beaux encore HĂ©las ! la bague Ă©tait brisĂ©e Que sâils Ă©taient dâargent ou dâor DâĂ©meraude ou de diamant Seront plus clairs plus clairs encore Que les astres du firmament Que la lumiĂšre de lâaurore Que vos regards mon fiancĂ© Auront meilleure odeur encore HĂ©las ! la bague Ă©tait brisĂ©e Que le lilas qui vient dâĂ©clore Que le thym la rose ou quâun brin De lavande ou de romarin Les musiciens sâen Ă©tant allĂ©s Nous continuĂąmes la promenade Au bord dâun lac On sâamusa Ă faire des ricochets Avec des cailloux plats Sur lâeau qui dansait Ă peine Des barques Ă©taient amarrĂ©es Dans un havre On les dĂ©tacha AprĂšs que toute la troupe se fut embarquĂ©e Et quelques morts ramaient Avec autant de vigueur que les vivants Ă lâavant du bateau que je gouvernais Un mort parlait avec une jeune femme VĂȘtue dâune robe jaune Dâun corsage noir Avec des rubans bleus et dâun chapeau gris OrnĂ© dâune seule petite plume dĂ©frisĂ©e Je vous aime Disait-il Comme le pigeon aime la colombe Comme lâinsecte nocturne Aime la lumiĂšre Trop tard RĂ©pondait la vivante Repoussez repoussez cet amour dĂ©fendu je suis mariĂ©e Voyez lâanneau qui brille Mes mains tremblent Je pleure et je voudrais mourir Les barques Ă©taient arrivĂ©es Ă un endroit oĂč les chevau-lĂ©gers Savaient quâun Ă©cho rĂ©pondait de la rive On ne se lassait point de lâinterroger Il y eut des questions si extravagantes Et des rĂ©ponses tellement pleines dâĂ -propos Que câĂ©tait Ă mourir de rire Et le mort disait Ă la vivante Nous serions si heureux ensemble Sur nous lâeau se refermera Mais vous pleurez et vos mains tremblent Aucun de nous ne reviendra On reprit terre et ce fut le retour Les amoureux sâentrâaimaient Et par couples aux belles bouches Marchaient Ă distances inĂ©gales Les morts avaient choisi les vivants Et les vivants Des mortes Un genĂ©vrier parfois Faisait lâeffet dâun fantĂŽme Les enfants dĂ©chiraient lâair En soufflant les joues creuses Dans leurs sifflets de viorne Ou de sureau Tandis que les militaires Chantaient des tyroliennes En se rĂ©pondant comme on le fait Dans la montagne Dans la ville Notre troupe diminua peu Ă peu On se disait Au revoir Ă demain Ă bientĂŽt Beaucoup entraient dans les brasseries Quelques-uns nous quittĂšrent Devant une boucherie canine Pour y acheter leur repas du soir BientĂŽt je restai seul avec ces morts Qui sâen allaient tout droit Au cimetiĂšre OĂč Sous les Arcades Je les reconnus CouchĂ©s Immobiles Eh bien vĂȘtus Attendant la sĂ©pulture derriĂšre les vitrines Ils ne se doutaient pas De ce qui sâĂ©tait passĂ© Mais les vivants en gardaient le souvenir CâĂ©tait un bonheur inespĂ©rĂ© Et si certain Quâils ne craignaient point de le perdre Ils vivaient si noblement Que ceux qui la veille encore Les regardaient comme leurs Ă©gaux Ou mĂȘme quelque chose de moins Admiraient maintenant Leur puissance leur richesse et leur gĂ©nie Car il y a-t-il rien qui vous Ă©lĂšve Comme dâavoir aimĂ© un mort ou une morte On devient si pur quâon en arrive Dans les glaciers de la mĂ©moire Ă se confondre avec le souvenir On est fortifiĂ© pour la vie Et lâon nâa plus besoin de personne CLOTILDE LâanĂ©mone et lâancolie Ont poussĂ© dans le jardin OĂč dort la mĂ©lancolie Entre lâamour et le dĂ©dain Il y vient aussi nos ombres Que la nuit dissipera Le soleil qui les rend sombres Avec elles disparaĂźtra Les dĂ©itĂ©s des eaux vives Laissent couler leurs cheveux Passe il faut que tu poursuives Cette belle ombre que tu veux CORTĂGE Ă M. LĂ©on Bailby Oiseau tranquille au vol inverse oiseau Qui nidifie en lâair Ă la limite oĂč notre sol brille dĂ©jĂ Baisse ta deuxiĂšme paupiĂšre la terre tâĂ©blouit Quand tu lĂšves la tĂȘte Et moi aussi de prĂšs je suis sombre et terne Une brume qui vient dâobscurcir les lanternes Une main qui tout Ă coup se pose devant les yeux Une voĂ»te entre vous et toutes les lumiĂšres Et je mâĂ©loignerai mâilluminant au milieu dâombres Et dâalignements dâyeux des astres bien-aimĂ©s Oiseau tranquille au vol inverse oiseau Qui nidifie en lâair Ă la limite oĂč brille dĂ©jĂ ma mĂ©moire Baisse ta deuxiĂšme paupiĂšre Ni Ă cause du soleil ni Ă cause de la terre Mais pour ce feu oblong dont lâintensitĂ© ira sâaugmentant Au point quâil deviendra un jour lâunique lumiĂšre Un jour Un jour je mâattendais moi-mĂȘme Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes Pour que je sache enfin celui-lĂ que je suis Moi qui connais les autres Je les connais par les cinq sens et quelques autres Il me suffit de voir leurs pieds pour pouvoir refaire ces gens Ă milliersDe voir leurs pieds paniques un seul de leurs cheveux Ou leur langue quand il me plaĂźt de faire le mĂ©decin Ou leurs enfants quand il me plaĂźt de faire le prophĂšte Les vaisseaux des amateurs la plume de mes confrĂšres La monnaie des aveugles les mains des muets Ou bien encore Ă cause du vocabulaire et non de lâĂ©critureUne lettre Ă©crite par ceux qui ont plus de vingt ans Il me suffit de sentir lâodeur de leurs Ă©glises Lâodeur des fleuves dans leurs villes Le parfum des fleurs dans les jardins publics Ă Corneille Agrippa lâodeur dâun petit chien mâeĂ»t suffi Pour dĂ©crire exactement tes concitoyens de Cologne Leurs rois-mages et la ribambelle ursuline Qui tâinspirait lâerreur touchant toutes les femmes Il me suffit de goĂ»ter la saveur du laurier quâon cultive pour que jâaime ou que je bafoueEt de toucher les vĂȘtements Pour ne pas douter si lâon est frileux ou non Ă gens que je connais Il me suffit dâentendre le bruit de leurs pas Pour pouvoir indiquer Ă jamais la direction quâils ont priseIl me suffit de tous ceux-lĂ pour me croire le droit De ressusciter les autres Un jour je mâattendais moi-mĂȘme Je me disais Guillaume il est temps que tu viennes Et dâun lyrique pas sâavançaient ceux que jâaime Parmi lesquels je nâĂ©tais pas Les gĂ©ants couverts dâalgues passaient dans leurs villesSous-marines oĂč les tours seules Ă©taient des Ăźles Et cette mer avec les clartĂ©s de ses profondeurs Coulait sang de mes veines et fait battre mon cĆur Puis sur terre il venait mille peuplades blanches Dont chaque homme tenait une rose Ă la main Et le langage quâils inventaient en chemin Je lâappris de leur bouche et je le parle encore Le cortĂšge passait et jây cherchais mon corps Tous ceux qui survenaient et nâĂ©taient pas moi-mĂȘme Amenaient un Ă un les morceaux de moi-mĂȘme On me bĂątit peu Ă peu comme on Ă©lĂšve une tour Les peuples sâentassaient et je parus moi-mĂȘme Quâont formĂ© tous les corps et les choses humaines Temps passĂ©s TrĂ©passĂ©s Les dieux qui me formĂątes Je ne vis que passant ainsi que vous passĂątes Et dĂ©tournant mes yeux de ce vide avenir En moi-mĂȘme je vois tout le passĂ© grandir Rien nâest mort que ce qui nâexiste pas encore PrĂšs du passĂ© luisant demain est incolore Il est informe aussi prĂšs de ce qui parfait PrĂ©sente tout ensemble et lâeffort et lâeffet MARIZIBILL Dans la Haute-Rue Ă Cologne Elle allait et venait le soir Offerte Ă tous en tout mignonne Puis buvait lasse des trottoirs TrĂšs tard dans les brasseries borgnes Elle se mettait sur la paille Pour un maquereau roux et rose CâĂ©tait un juif il sentait lâail Et lâavait venant de Formose TirĂ©e dâun bordel de ChangaĂŻ Je connais gens de toutes sortes Ils nâĂ©galent pas leurs destins IndĂ©cis comme feuilles mortes Leurs yeux sont des feux mal Ă©teints Leurs cĆurs bougent comme leurs portes LE VOYAGEUR Ă Fernand Fleuret Ouvrez-moi cette porte oĂč je frappe en pleurant La vie est variable aussi bien que lâEuripe Tu regardais un banc de nuages descendre Avec le paquebot orphelin vers les fiĂšvres futures Et de tous ces regrets de tous ces repentirsTe souviens-tu Vagues poissons arques fleurs surmarines Une nuit câĂ©tait la mer Et les fleuves sây rĂ©pandaient Je mâen souviens je mâen souviens encore Un soir je descendis dans une auberge triste AuprĂšs de Luxembourg Dans le fond de la salle il sâenvolait un Christ Quelquâun avait un furet Un autre un hĂ©risson Lâon jouait aux cartes Et toi tu mâavais oubliĂ© Te souviens-tu du long orphelinat des gares Nous traversĂąmes des villes qui tout le jour tournaient Et vomissaient la nuit le soleil des journĂ©es Ă matelots ĂŽ femmes sombres et vous mes compagnonsSouvenez-vous-en Deux matelots qui ne sâĂ©taient jamais quittĂ©s Deux matelots qui ne sâĂ©taient jamais parlĂ© Le plus jeune en mourant tomba sur le cĂŽtéà vous chers compagnons Sonneries Ă©lectriques des gares chant des moissonneusesTraĂźneau dâun boucher rĂ©giment des rues sans nombre Cavalerie des ponts nuits livides de lâalcool Les villes que jâai vues vivaient comme des folles Te souviens-tu des banlieues et du troupeau plaintif des paysagesLes cyprĂšs projetaient sous la lune leurs ombres JâĂ©coutais cette nuit au dĂ©clin de lâĂ©tĂ© Un oiseau langoureux et toujours irritĂ© Et le bruit Ă©ternel dâun fleuve large et sombre Mais tandis que mourants roulaient vers lâestuaire Tous les regards tous les regards de tous les yeux Les bords Ă©taient dĂ©serts herbus silencieux Et la montagne Ă lâautre rive Ă©tait trĂšs claire Alors sans bruit sans quâon pĂ»t voir rien de vivant Contre le mont passĂšrent des ombres vivaces De profil ou soudain tournant leurs vagues faces Et tenant lâombre de leurs lances en avant Les ombres contre le mont perpendiculaire Grandissaient ou parfois sâabaissaient brusquement Et ces ombres barbues pleuraient humainement En glissant pas Ă pas sur la montagne claire Qui donc reconnais-tu sur ces vieilles photographies Te souviens-tu du jour oĂč une abeille tomba dans le feu CâĂ©tait tu tâen souviens Ă la fin de lâĂ©tĂ© Deux matelots qui ne sâĂ©taient jamais quittĂ©s LâaĂźnĂ© portait au cou une chaĂźne de fer Le plus jeune mettait ses cheveux blonds en tresse Ouvrez-moi cette porte oĂč je frappe en pleurant La vie est variable aussi bien que lâEuripe MARIE Vous y dansiez petite fille Y danserez-vous mĂšre-grand Câest la maclotte qui sautille Toutes les cloches sonneront Quand donc reviendrez-vous Marie Des masques sont silencieux Et la musique est si lointaine Quâelle semble venir des cieux Oui je veux vous aimer mais vous aimer Ă peine Et mon mal est dĂ©licieux Les brebis sâen vont dans la neige Flocons de laine et ceux dâargent Des soldats passent et que nâai-je Un cĆur Ă moi ce cĆur changeant Changeant et puis encor que sais-je Sais-je oĂč sâen iront tes cheveux CrĂ©pus comme mer qui moutonne Sais-je oĂč sâen iront tes cheveux Et tes mains feuilles de lâautomne Que jonchent aussi nos aveux Je passais au bord de la Seine Un livre ancien sous le bras Le fleuve est pareil Ă ma peine Il sâĂ©coule et ne tarit pas Quand donc finira la semaine LA BLANCHE NEIGE Les anges les anges dans le ciel Lâun est vĂȘtu en officier Lâun est vĂȘtu en cuisinier Et les autres chantent Bel officier couleur du ciel Le doux printemps longtemps aprĂšs NoĂ«l Te mĂ©daillera dâun beau soleilDâun beau soleil Le cuisinier plume les oiesAh ! tombe neigeTombe et que nâai-je Ma bien-aimĂ©e entre mes bras POĂME LU AU MARIAGEDâANDRĂ SALMON Le 13 juillet 1909 En voyant des drapeaux ce matin je ne me suis pas dit VoilĂ les riches vĂȘtements des pauvres Ni la pudeur dĂ©mocratique veut me voiler sa douleur Ni la libertĂ© en honneur fait quâon imite maintenant Les feuilles ĂŽ libertĂ© vĂ©gĂ©tale ĂŽ seule libertĂ© terrestre Ni les maisons flambent parce quâon partira pour ne plus revenirNi ces mains agitĂ©es travailleront demain pour nous tousNi mĂȘme on a pendu ceux qui ne savaient pas profiter de la vieNi mĂȘme on renouvelle le monde en reprenant la Bastille Je sais que seuls le renouvellent ceux qui sont fondĂ©s en poĂ©sieOn a pavoisĂ© Paris parce que mon ami AndrĂ© Salmon sây marie Nous nous sommes rencontrĂ©s dans un caveau maudit Au temps de notre jeunesse Fumant tous deux et mal vĂȘtus attendant lâaube Ăpris Ă©pris des mĂȘmes paroles dont il faudra changer le sensTrompĂ©s trompĂ©s pauvres petits et ne sachant pas encore rireLa table et les deux verres devinrent un mourant qui nous jeta le dernier regard dâOrphĂ©eLes verres tombĂšrent se brisĂšrent Et nous apprĂźmes Ă rire Nous partĂźmes alors pĂšlerins de la perdition Ă travers les rues Ă travers les contrĂ©es Ă travers la raisonJe le revis au bord du fleuve sur lequel flottait OphĂ©lie Qui blanche flotte encore les nĂ©nuphars Il sâen allait au milieu des Hamlets blafards Sur la flĂ»te jouant les airs de la folie Je le revis prĂšs dâun moujik mourant compter les bĂ©atitudes En admirant la neige semblable aux femmes nues Je le revis faisant ceci ou cela en lâhonneur des mĂȘmes parolesQui changent la face des enfants et je dis toutes ces chosesSouvenir et Avenir parce que mon ami AndrĂ© Salmon se marie RĂ©jouissons-nous non pas parce que notre amitiĂ© a Ă©tĂ© le fleuve qui nous a fertilisĂ©sTerrains riverains dont lâabondance est la nourriture que tous espĂšrentNi parce que nos verres nous jettent encore une fois le regard dâOrphĂ©e mourantNi parce que nous avons tant grandi que beaucoup pourraient confondre nos yeux et les Ă©toilesNi parce que les drapeaux claquent aux fenĂȘtres des citoyens qui sont contents depuis cent ans dâavoir la vie et de menues choses Ă dĂ©fendreNi parce que fondĂ©s en poĂ©sie nous avons des droits sur les paroles qui forment et dĂ©font lâUniversNi parce que nous pouvons pleurer sans ridicule et que nous savons rireNi parce que nous fumons et buvons comme autrefois RĂ©jouissons-nous parce que directeur du feu et des poĂštesLâamour qui emplit ainsi que la lumiĂšre Tout le solide espace entre les Ă©toiles et les planĂštes Lâamour veut quâaujourdâhui mon ami AndrĂ© Salmon se marie LâADIEU Jâai cueilli ce brin de bruyĂšre Lâautomne est morte souviens-tâen Nous ne nous verrons plus sur terre Odeur du temps brin de bruyĂšre Et souviens-toi que je tâattends SALOMĂ Pour que sourie encore une fois Jean-Baptiste Sire je danserais mieux que les sĂ©raphins Ma mĂšre dites-moi pourquoi vous ĂȘtes triste En robe de comtesse Ă cĂŽtĂ© du Dauphin Mon cĆur battait battait trĂšs fort Ă sa parole Quand je dansais dans le fenouil en Ă©coutant Et je brodais des lys sur une banderole DestinĂ©e Ă flotter au bout de son bĂąton Et pour qui voulez-vous quâĂ prĂ©sent je la brode Son bĂąton refleurit sur les bords du Jourdain Et tous les lys quand vos soldats ĂŽ roi HĂ©rode LâemmenĂšrent se sont flĂ©tris dans mon jardin Venez tous avec moi lĂ -bas sous les quinconcesï»żNe pleure pas ĂŽ joli fou du roi Prends cette tĂȘte au lieu de ta marotte et danse Nây touchez pas son front ma mĂšre est dĂ©jĂ froid Sire marchez devant trabants marchez derriĂšre Nous creuserons un trou et lây enterrerons Nous planterons des fleurs et danserons en rond JusquâĂ lâheure oĂč jâaurai perdu ma jarretiĂšreï»żLe roi sa tabatiĂšreï»żLâinfante son rosaireï»żLe curĂ© son brĂ©viaire LA PORTE La porte de lâhĂŽtel sourit terriblement Quâest-ce que cela peut me faire ĂŽ ma maman DâĂȘtre cet employĂ© pour qui seul rien nâexiste Pi-mus couples allant dans la profonde eau triste Anges frais dĂ©barquĂ©s Ă Marseille hier matin Jâentends mourir et remourir un chant lointain Humble comme je suis qui ne suis rien qui vaille Enfant je tâai donnĂ© ce que jâavais travaille MERLIN ET LA VIEILLE FEMME Le soleil ce jour-lĂ sâĂ©talait comme un ventre Maternel qui saignait lentement sur le ciel La lumiĂšre est ma mĂšre ĂŽ lumiĂšre sanglante Les nuages coulaient comme un flux menstruel Au carrefour oĂč nulle fleur sinon la rose Des vents mais sans Ă©pine nâa fleuri lâunivers Merlin guettait la vie et lâĂ©ternelle cause Qui fait mourir et puis renaĂźtre lâunivers Une vieille sur une mule Ă chape verte Sâen vint suivant la berge du fleuve en aval Et lâantique Merlin dans la plaine dĂ©serte Se frappait la poitrine en sâĂ©criant Rival Ă mon ĂȘtre glacĂ© dont le destin mâaccable Dont ce soleil de chair grelotte veux-tu voir Ma MĂ©moire venir et mâaimer ma semblable Et quel fils malheureux et beau je veux avoir Son geste fit crouler lâorgueil des cataclysmes Le soleil en dansant remuait son nombril Et soudain le printemps dâamour et dâhĂ©roĂŻsme Amena par la main un jeune jour dâavril Les voies qui viennent de lâouest Ă©taient couvertes Dâossements dâherbes drues de destins et de fleurs Des monuments tremblants prĂšs des charognes vertes Quand les vents apportaient des poils et des malheurs Laissant sa mule Ă petits pas sâen vint lâamante Ă petits coups le vent dĂ©fripait ses atours Puis les pĂąles amants joignant leurs mains dĂ©mentes Lâentrelac de leurs doigts fut leur seul laps dâamour Elle balla mimant un rythme dâexistence Criant depuis cent ans jâespĂ©rais ton appel Les astres de ta vie influaient sur ma danse Morgane regardait du haut du mont Gibel Ah ! quâil fait doux danser quand pour vous se dĂ©clare Un mirage oĂč tout chante et que les vents dâhorreur Feignant dâĂȘtre le rire de la lune hilare Et dâeffrayer les fantĂŽmes avant-coureurs Jâai fait des gestes blancs parmi les solitudes Des lĂ©mures couraient peupler les cauchemars Mes tournoĂźments exprimaient les bĂ©atitudes Qui toutes ne sont rien quâun pur effet de lâArt Je nâai jamais cueilli que la fleur dâaubĂ©pine Aux printemps finissants qui voulaient dĂ©fleurir Quand les oiseaux de proie proclamaient leurs rapines Dâagneaux mort-nĂ©s et dâenfants-dieux qui vont mourir Et jâai vieilli vois-tu pendant ta vie je danse Mais jâeusse Ă©tĂ© tĂŽt lasse et lâaubĂ©pine en fleurs Cet avril aurait eu la pauvre confidence Dâun corps de vieille morte en mimant la douleur Et leurs mains sâĂ©levaient comme un vol de colombes ClartĂ© sur qui la nuit fondit comme un vautour. Puis Merlin sâen alla vers lâest disant Quâil monte Le fils de la MĂ©moire Ă©gale de lâAmour Quâil monte de la fange ou soit une ombre dâhomme Il sera bien mon fils mon ouvrage immortel Le front nimbĂ© de feu sur le chemin de Rome Il marchera tout seul en regardant le ciel La dame qui mâattend se nomme Viviane Et vienne le printemps des nouvelles douleurs CouchĂ© parmi la marjolaine et les pas-dâĂąne Je mâĂ©terniserai sous lâaubĂ©pine en fleurs SALTIMBANQUES Ă Louis Dumur Dans la plaine les baladins SâĂ©loignent au long des jardins Devant lâhuis des auberges grises Par les villages sans Ă©glises Et les enfants sâen vont devant Les autres suivent en rĂȘvant Chaque arbre fruitier se rĂ©signe Quand de trĂšs loin ils lui font signe Ils ont des poids ronds ou carrĂ©s Des tambours des cerceaux dorĂ©s Lâours et le singe animaux sages QuĂȘtent des sous sur leur passage LE LARRON CHĆUR Maraudeur Ă©tranger malheureux malhabile Voleur voleur que ne demandais-tu ces fruits Mais puisque tu as faim que tu es en exil Il pleure il est barbare et bon pardonnez-lui LARRON Je confesse le vol des fruits doux des fruits mĂ»rs Mais ce nâest pas lâexil que je viens simuler Et sachez que jâattends de moyennes tortures Injustes si je rends tout ce que jâai volĂ© VIEILLARD Issu de lâĂ©cume des mers comme Aphrodite Sois docile puisque tu es beau NaufragĂ© Vois les sages te font des gestes socratiques Vous parlerez dâamour quand il aura mangĂ© CHĆUR Maraudeur Ă©tranger malhabile et malade Ton pĂšre fut un sphinx et ta mĂšre une nuit Qui charma de lueurs Zacinthe et les Cyclades As-tu feint dâavoir faim quand tu volas les fruits LARRON Possesseurs de fruits mĂ»rs que dirai-je aux insultes OuĂŻr ta voix figure en nĂ©nie ĂŽ maman Puisquâils nâeurent enfin la pubĂšre et lâadulte Du prĂ©texte sinon que sâaimer nuitamment Il y avait des fruits tout ronds comme des Ăąmes Et des amandes de pomme de pin jonchaient Votre jardin marin oĂč jâai laissĂ© mes rames Et mon couteau punique au pied de ce pĂȘcher Les citrons couleur dâhuile et Ă saveur dâeau froide Pendaient parmi les fleurs des citronniers tordus Les oiseaux de leur bec ont blessĂ© vos grenades Et presque toutes les figues Ă©taient fendues LâACTEUR Il entra dans la salle aux fresques qui figurent Lâinceste solaire et nocturne dans les nues Assieds-toi lĂ pour mieux ouĂŻr les voix ligures Au son des cinyres des Lydiennes nues Or les hommes ayant des masques de théùtre Et les femmes ayant des colliers oĂč pendait La pierre prise au foie dâun vieux coq de Tanagre Parlaient entre eux le langage de la ChaldĂ©e Les autans langoureux dehors feignaient lâautomne Les convives câĂ©taient tant de couples dâamants Qui dirent tour Ă tour Voleur je te pardonne. Reçois dâabord le sel puis le pain de froment Le brouet qui froidit sera fade Ă tes lĂšvres Mais lâoutre en peau de bouc maintient frais le vin blanc Par ironie veux-tu quâon serve un plat de fĂšves Ou des beignets de fleurs trempĂ©s dans du miel blond Une femme lui dit Tu nâinvoques personne Crois-tu donc au hasard qui coule au sablier Voleur connais-tu mieux les lois malgrĂ© les hommes Veux-tu le talisman heureux de mon collier Larron des fruits tourne vers moi tes yeux lyriques Emplissez de noix la besace du hĂ©ros Il est plus noble que le paon pythagorique Le dauphin la vipĂšre mĂąle ou le taureau Qui donc es-tu toi qui nous vins grĂące au vent scythe Il en est tant venu par la route ou la mer ConquĂ©rants Ă©garĂ©s qui sâĂ©loignaient trop vite Colonnes de clins dâyeux qui fuyaient aux Ă©clairs CHĆUR Un homme bĂšgue ayant au front deux jets de flammes Passa menant un peuple infime pour lâorgueil De manger chaque jour les cailles et la manne Et dâavoir vu la mer ouverte comme un Ćil Les puiseurs dâeau barbus coiffĂ©s de bandelettes Noires et blanches contre les maux et les sorts Revenaient de lâEuphrate et les yeux des chouettes Attiraient quelquefois les chercheurs de trĂ©sors Cet insecte jaseur ĂŽ poĂšte barbare Regagnait chastement Ă lâheure dây mourir La forĂȘt prĂ©cieuse aux oiseaux gemmipares Aux crapauds que lâazur et les sources mĂ»rirent. Un triomphe passait gĂ©mir sous lâarc-en-ciel Avec de blĂȘmes laurĂ©s debout dans les chars Les statues suant les scurriles les agnelles Et lâangoisse rauque des paonnes et des jars Les veuves prĂ©cĂ©daient en Ă©grenant des grappes Les Ă©vĂȘques noirs rĂ©vĂ©rant sans le savoir Au triangle isocĂšle ouvert au mors des chapes Pallas et chantaient lâhymne Ă la belle mais noire Les chevaucheurs nous jetĂšrent dans lâavenir Les alcancies pleines de cendre ou bien de fleurs Nous aurons des baisers florentins sans le dire Mais au jardin ce soir tu vins sage et voleur Ceux de ta secte adorent-ils un signe obscĂšne ; BelphĂ©gor le soleil le silence ou le chien Cette furtive ardeur des serpents qui sâentrâaiment LâACTEUR Et le larron des fruits cria Je suis chrĂ©tien CHĆUR Ah ! Ah ! les colliers tinteront cherront les masques Va-tâen va-tâen contre le feu lâombre prĂ©vaut Ah ! Ah ! le larron de gauche dans la bourrasque Rira de toi comme hennissent les chevaux FEMME Larron des fruits tourne vers moi tes yeux lyriques Emplissez de noix la besace du hĂ©ros Il est plus noble que le paon pythagorique Le dauphin la vipĂšre mĂąle ou le taureau CHĆUR Ah ! Ah ! nous secouerons toute la nuit les sistres La voix ligure Ă©tait-ce donc un talisman Et si tu nâes pas de droite tu es sinistre Comme une tache grise ou le pressentiment Puisque lâabsolu choit la chute est une preuve Qui double devient triple avant dâavoir Ă©tĂ© Nous avouons que les grossesses nous Ă©meuvent Les ventres pourront seuls nier lâasĂ©itĂ© Vois les vases sont pleins dâhumides fleurs morales Va-tâen mais dĂ©nudĂ© puisque tout est Ă nous OuĂŻs du chĆur des vents les cadences plagales Et prends lâarc pour tuer lâunicorne ou le gnou Lâombre Ă©quivoque et tendre est le deuil de ta chair Et sombre elle est humaine et puis la nĂŽtre aussi Va-tâen le crĂ©puscule a des lueurs lĂ©gĂšres Et puis aucun de nous ne croirait tes rĂ©cits Il brillait et attirait comme la pantaure Que nâavait-il la voix et les jupes dâOrphĂ©e Et les femmes la nuit feignant dâĂȘtre des taures Lâeussent aimĂ© comme on lâaima puisquâen effet Il Ă©tait pĂąle il Ă©tait beau comme un roi ladre Que nâavait-il la voix et les jupes dâOrphĂ©e La pierre prise au foie dâun vieux coq de Tanagre Au lieu du roseau triste et du funĂšbre faix Que nâalla-t-il vivre Ă la cour du roi dâĂdesse Maigre et magique il eĂ»t scrutĂ© le firmament PĂąle et magique il eĂ»t aimĂ© des poĂ©tesses Juste et magique il eĂ»t Ă©pargnĂ© les dĂ©mons Va-tâen errer crĂ©dule et roux avec ton ombre Soit ! la triade est mĂąle et tu es vierge et froid Le tact est relatif mais la vue est oblongue Tu nâas de signe que le signe de la croix LE VENT NOCTURNE Oh ! les cimes des pins grincent en se heurtant Et lâon entend aussi se lamenter lâautan Et du fleuve prochain Ă grandâvoix triomphales Les elfes rire au vent ou corner aux rafales Attys Attys Attys charmant et dĂ©braillĂ© Câest ton nom quâen la nuit les elfes ont raillĂ© Parce quâun de tes pins sâabat au vent gothique La forĂȘt fuit au loin comme une armĂ©e antique Dont les lances ĂŽ pins sâagitent au tournant Les villages Ă©teints mĂ©ditent maintenant Comme les vierges les vieillards et les poĂštes Et ne sâĂ©veilleront au pas de nul venant Ni quand sur leurs pigeons fondront les gypaĂštes LUL DE FALTENIN Ă Louis de Gonzague Frick SirĂšnes jâai rampĂ© vers vos Grottes tiriez aux mers la langue En dansant devant leurs chevaux Puis battiez de vos ailes dâanges Et jâĂ©coutais ces chĆurs rivaux Une arme ĂŽ ma tĂȘte inquiĂšte Jâagite un feuillard dĂ©fleuri Pour Ă©carter lâhaleine tiĂšde Quâexhalent contre mes grands cris Vos terribles bouches muettes Il y a lĂ -bas la merveille Au prix dâelle que valez-vous Le sang jaillit de mes otelles Ă mon aspect et je lâavoue Le meurtre de mon double orgueil Si les bateliers ont ramĂ© Loin des lĂšvres Ă fleur de lâonde Mille et mille animaux charmĂ©s Flairant la route Ă la rencontre De mes blessures bien-aimĂ©es Leurs yeux Ă©toiles bestiales Ăclairent ma compassion Quâimporte ma sagesse Ă©gale Celle des constellations Car câest moi seul nuit qui tâĂ©toile SirĂšnes enfin je descends Dans une grotte avide Jâaime Vos yeux Les degrĂ©s sont glissants Au loin que vous devenez naines Nâattirez plus aucun passant Dans lâattentive et bien-apprise Jâai vu feuilloler nos forĂȘts Mer le soleil se gargarise OĂč les matelots dĂ©siraient Que vergues et mĂąts reverdissent Je descends et le firmament Sâest changĂ© trĂšs vite en mĂ©duse Puisque je flambe atrocement Que mes bras seuls sont les excuses Et les torches de mon tourment Oiseaux tiriez aux mers la langue Le soleil dâhier mâa rejoint Les otelles nous ensanglantent Dans le nid des SirĂšnes loin Du troupeau dâĂ©toiles oblongues LA TZIGANE La tzigane savait dâavance Nos deux vies barrĂ©es par les nuits Nous lui dĂźmes adieu et puis De ce puits sortit lâEspĂ©rance Lâamour lourd comme un ours privĂ© Dansa debout quand nous voulĂ»mes Et lâoiseau bleu perdit ses plumes Et les mendiants leurs Ave On sait trĂšs bien que lâon se damne Mais lâespoir dâaimer en chemin Nous fait penser main dans la main Ă ce quâa prĂ©dit la tzigane LâERMITE Ă Felix FĂ©nĂ©on Un ermite dĂ©chaux prĂšs dâun crĂąne blanchi Cria Je vous maudis martyres et dĂ©tresses Trop de tentations malgrĂ© moi me caressent Tentations de lune et de logomachies Trop dâĂ©toiles sâenfuient quand je dis mes priĂšres Ă chef de morte Ă vieil ivoire Orbites Trous Des narines rongĂ©es Jâai faim Mes cris sâenrouent Voici donc pour mon jeĂ»ne un morceau de gruyĂšre Ă Seigneur flagellez les nuĂ©es du coucher Qui vous tendent au ciel de si jolis culs roses Et câest le soir les fleurs de jour dĂ©jĂ se closent Et les souris dans lâombre incantent le plancher Les humains savent tant de jeux lâamour la mourre Lâamour jeu des nombrils ou jeu de la grande oie La mourre jeu du nombre illusoire des doigts Seigneur faites Seigneur quâun jour je mâenamoure Jâattends celle qui me tendra ses doigts menus Combien de signes blancs aux ongles les paresses Les mensonges pourtant jâattends quâelle les dresse Ses mains enamourĂ©es devant moi lâInconnue Seigneur que tâai-je fait Vois Je suis unicorne Pourtant malgrĂ© son bel effroi concupiscent Comme un poupon chĂ©ri mon sexe est innocent DâĂȘtre anxieux seul et debout comme une borne Seigneur le Christ est nu jetez jetez sur lui La robe sans couture Ă©teignez les ardeurs Au puits vont se noyer tant de tintements dâheures Quand isochrones choient des gouttes dâeau de pluie Jâai veillĂ© trente nuits sous les lauriers-roses As-tu suĂ© du sang Christ dans GethsĂ©mani CrucifiĂ© rĂ©ponds Dis non Moi je le nie Car jâai trop espĂ©rĂ© en vain lâhĂ©matidrose JâĂ©coutais Ă genoux toquer les battements Du cĆur le sang roulait toujours en ses artĂšres Qui sont de vieux coraux ou qui sont des clavaires Et mon aorte Ă©tait avare Ă©perdument Une goutte tomba Sueur Et sa couleur Lueur Le sang si rouge et jâai ri des damnĂ©s Puis enfin jâai compris que je saignais du nez Ă cause des parfums violents de mes fleurs Et jâai ri du vieil ange qui nâest point venu De vol trĂšs indolent me tendre un beau calice Jâai ri de lâaile grise et jâĂŽte mon cilice TissĂ© de crins soyeux par de cruels canuts Vertuchou Riotant des vulves des papesses De saintes sans tetons jâirai vers les citĂ©s Et peut-ĂȘtre y mourir pour ma virginitĂ© Parmi les mains les peaux les mots et les promesses MalgrĂ© les autans bleus je me dresse divin Comme un rayon de lune adorĂ© par la mer En vain jâai suppliĂ© tous les saints aĂ©mĂšres Aucun nâa consacrĂ© mes doux pains sans levain Et je marche Je fuis ĂŽ nuit Lilith ulule Et clame vainement et je vois de grands yeux Sâouvrir tragiquement Ă nuit je vois tes cieux SâĂ©toiler calmement de splendides pilules Un squelette de reine innocente est pendu Ă un long fil dâĂ©toile en dĂ©sespoir sĂ©vĂšre La nuit les bois sont noirs et se meurt lâespoir vert Quand meurt le jour avec un rĂąle inattendu Et je marche je fuis ĂŽ jour lâĂ©moi de lâaube Ferma le regard fixe et doux de vieux rubis Des hiboux et voici le regard des brebis Et des truies aux tetins roses comme des lobes Des corbeaux Ă©ployĂ©s comme des tildes font Une ombre vaine aux pauvres champs de seigle mĂ»r Non loin des bourgs oĂč des chaumiĂšres sont impures Dâavoir des hiboux morts clouĂ©s Ă leur plafond Mes kilomĂštres longs Mes tristesses plĂ©niĂšres Les squelettes de doigts terminant les sapins Ont Ă©garĂ© ma route et mes rĂȘves poupins Souvent et jâai dormi au sol des sapiniĂšres Enfin Ă soir pĂąmĂ© Au bout de mes chemins La ville mâapparut trĂšs grave au son des cloches Et ma luxure meurt Ă prĂ©sent que jâapproche En entrant jâai bĂ©ni les foules des deux mains CitĂ© jâai ri de tes palais tels que des truffes Blanches au sol fouillĂ© de clairiĂšres bleues Or mes dĂ©sirs sâen vont tous Ă la queue leu leu Ma migraine pieuse a coiffĂ© sa cucuphe Car toutes sont venues mâavouer leurs pĂ©chĂ©s Et Seigneur je suis saint par le vĆu des amantes ZĂ©lotide et Lorie Louise et Diamante On dit Tu peux savoir ĂŽ toi lâeffarouchĂ© Ermite absous nos fautes jamais vĂ©nielles Ă toi le pur et le contrit que nous aimons Sache nos cĆurs cache les jeux que nous aimons Et nos baisers quintessenciĂ©s comme du miel Et jâabsous les aveux pourpres comme leur sang Des poĂ©tesses nues des fĂ©es des fornarines Aucun pauvre dĂ©sir ne gonfle ma poitrine Lorsque je vois le soir les couples sâenlaçant Car je ne veux plus rien sinon laisser se clore Mes yeux couple lassĂ© au verger pantelant Plein du rĂąle pompeux des groseilliers sanglants Et de la sainte cruautĂ© des passiflores AUTOMNE Dans le brouillard sâen vont un paysan cagneux Et son bĆuf lentement dans le brouillard dâautomne Qui cache les hameaux pauvres et vergogneux Et sâen allant lĂ -bas le paysan chantonne Une chanson dâamour et dâinfidĂ©litĂ© Qui parle dâune bague et dâun cĆur que lâon brise Oh ! lâautomne lâautomne a fait mourir lâĂ©tĂ© Dans le brouillard sâen vont deux silhouettes grises LâĂMIGRANT DE LANDOR ROAD Ă AndrĂ© Billy Le chapeau Ă la main il entra du pied droit Chez un tailleur trĂšs chic et fournisseur du roi Ce commerçant venait de couper quelques tĂȘtes De mannequins vĂȘtus comme il faut quâon se vĂȘte La foule en tous les sens remuait en mĂȘlant Des ombres sans amour qui se traĂźnaient par terre Et des mains vers le ciel plein de lacs de lumiĂšre Sâenvolaient quelquefois comme des oiseaux blancsMon bateau partira demain pour lâAmĂ©riqueEt je ne reviendrai jamais Avec lâargent gagnĂ© dans les prairies lyriques Guider mon ombre aveugle en ces rues que jâaimais Car revenir câest bon pour un soldat des Indes Les boursiers ont vendu tous mes crachats dâor fin Mais habillĂ© de neuf je veux dormir enfin Sous des arbres pleins dâoiseaux muets et de singes Les mannequins pour lui sâĂ©tant dĂ©shabillĂ©s Battirent leurs habits puis les lui essayĂšrent Le vĂȘtement dâun lord mort sans avoir payĂ© Au rabais lâhabilla comme un millionnaireï»żAu dehors les annĂ©esï»żRegardaient la vitrineï»żLes mannequins victimesï»żEt passaient enchaĂźnĂ©es IntercalĂ©es dans lâan câĂ©taient les journĂ©es veuves Les vendredis sanglants et lents dâenterrements De blancs et de tout noirs vaincus des cieux qui pleuvent Quand la femme du diable a battu son amant Puis dans un port dâautomne aux feuilles indĂ©cises Quand les mains de la foule y feuillolaient aussi Sur le pont du vaisseau il posa sa valiseï»żEt sâassit Les vents de lâOcĂ©an en soufflant leurs menaces Laissaient dans ses cheveux de longs baisers mouillĂ©s Des Ă©migrants tendaient vers le port leurs mains lasses Et dâautres en pleurant sâĂ©taient agenouillĂ©s Il regarda longtemps les rives qui moururent Seuls des bateaux dâenfant tremblaient Ă lâhorizon Un tout petit bouquet flottant Ă lâaventure Couvrit lâOcĂ©an dâune immense floraison Il aurait voulu ce bouquet comme la gloire Jouer dans dâautres mers parmi tous les dauphinsï»żEt lâon tissait dans sa mĂ©moireï»żUne tapisserie sans finï»żQui figurait son histoire Mais pour noyer changĂ©es en poux Ces tisseuses tĂȘtues qui sans cesse interrogentIl se maria comme un doge Aux cris dâune sirĂšne moderne sans Ă©poux Gonfle-toi vers la nuit Ă Mer Les yeux des squales JusquâĂ lâaube ont guettĂ© de loin avidement Des cadavres de jours rongĂ©s par les Ă©toiles Parmi le bruit des flots et les derniers serments ROSEMONDE Ă AndrĂ© Derain Longtemps au pied du perron de La maison oĂč entra la dame Que jâavais suivie pendant deux Bonnes heures Ă Amsterdam Mes doigts jetĂšrent des baisers Mais le canal Ă©tait dĂ©sert Le quai aussi et nul ne vit Comment mes baisers retrouvĂšrent Celle Ă qui jâai donnĂ© ma vie Un jour pendant plus de deux heures Je la surnommai Rosemonde Voulant pouvoir me rappeler Sa bouche fleurie en Hollande Puis lentement je mâallai Pour quĂȘter la Rose du Monde LE BRASIER Ă Paul-NapolĂ©on Roinard Jâai jetĂ© dans le noble feu Que je transporte et que jâadore De vives mains et mĂȘme feu Ce PassĂ© ces tĂȘtes de morts Flamme je fais ce que tu veux Le galop soudain des Ă©toiles NâĂ©tant que ce qui deviendra Se mĂȘle au hennissement mĂąle Des centaures dans leurs haras Et des grandâplaintes vĂ©gĂ©tales OĂč sont ces tĂȘtes que jâavais OĂč est le Dieu de ma jeunesse Lâamour est devenu mauvais Quâau brasier les flammes renaissent Mon Ăąme au soleil se dĂ©vĂȘt Dans la plaine ont poussĂ© des flammes Nos cĆurs pendent aux citronniers Les tĂȘtes coupĂ©es qui mâacclament Et les astres qui ont saignĂ© Ne sont que des tĂȘtes de femmes Le fleuve Ă©pinglĂ© sur la ville Tây fixe comme un vĂȘtement Partant Ă lâamphion docile Tu subis tous les tons charmants Qui rendent les pierres agiles Je flambe dans le brasier Ă lâardeur adorable Et les mains des croyants mây rejettent multiple innombrablementLes membres des intercis flambent auprĂšs de moi Ăloignez du brasier les ossements Je suffis pour lâĂ©ternitĂ© Ă entretenir le feu de mes dĂ©lices Et des oiseaux protĂšgent de leurs ailes ma face et le soleil Ă MĂ©moire Combien de races qui forlignent Des Tyndarides aux vipĂšres ardentes de mon bonheur Et les serpents ne sont-ils que les cous des cygnes Qui Ă©taient immortels et nâĂ©taient pas chanteurs Voici ma vie renouvelĂ©e De grands vaisseaux passent et repassent Je trempe une fois encore mes mains dans lâOcĂ©an Voici le paquebot et ma vie renouvelĂ©e Ses flammes sont immenses Il nây a plus rien de commun entre moi Et ceux qui craignent les brĂ»lures Descendant des hauteurs oĂč pense la lumiĂšre Jardins rouant plus haut que tous les ciels mobiles Lâavenir masquĂ© flambĂ© en traversant les cieux Nous attendons ton bon plaisir ĂŽ mon amie Jâose Ă peine regarder la divine mascarade Quand bleuira sur lâhorizon la DĂ©sirade Au delĂ de notre atmosphĂšre sâĂ©lĂšve un théùtre Que construisit le ver Zamir sans instrument Puis le soleil revint ensoleiller les places Dâune ville marine apparue contremont Sur les toits se reposaient les colombes lasses Et le troupeau de sphinx regagne la sphingerie Ă petits pas Il orra le chant du pĂątre toute la vie LĂ -haut le théùtre est bĂąti avec le feu solide Comme les astres dont se nourrit le videï»żEt voici le spectacle Et pour toujours je suis assis dans un fauteuil Ma tĂȘte mes genoux mes coudes vain pentacle Les flammes ont poussĂ© sur moi comme des feuilles Des acteurs inhumains claires bĂȘtes nouvelles Donnent des ordres aux hommes apprivoisĂ©sï»żTerre Ă DĂ©chirĂ©e que les fleuves ont reprisĂ©e Jâaimerais mieux nuit et jour dans les sphingeries Vouloir savoir pour quâenfin on mây dĂ©vorĂąt RHĂNANES NUIT RHĂNANE Mon verre est plein dâun vin trembleur comme une flamme Ăcoutez la chanson lente dâun batelier Qui raconte avoir vu sous la lune sept femmes Tordre leurs cheveux verts et longs jusquâĂ leurs pieds Debout chantez plus haut en dansant une ronde Que je nâentende plus le chant du batelier Et mettez prĂšs de moi toutes les filles blondes Au regard immobile aux nattes repliĂ©es Le Rhin le Rhin est ivre oĂč les vignes se mirent Tout lâor des nuits tombe en tremblant sây reflĂ©ter La voix chante toujours Ă en rĂąle-mourir Ces fĂ©es aux cheveux verts qui incantent lâĂ©tĂ© Mon verre sâest brisĂ© comme un Ă©clat de rire MAI Le mai le joli mai en barque sur le Rhin Des dames regardaient du haut de la montagne Vous ĂȘtes si jolies mais la barque sâĂ©loigne Qui donc a fait pleurer les saules riverains Or des vergers fleuris se figeaient en arriĂšre Les pĂ©tales tombĂ©s des cerisiers de mai Sont les ongles de celle que jâai tant aimĂ©e Les pĂ©tales flĂ©tris sont comme ses paupiĂšres Sur le chemin du bord du fleuve lentement Un ours un singe un chien menĂ©s par des tziganes Suivaient une roulotte traĂźnĂ©e par un Ăąne Tandis que sâĂ©loignait dans les vignes rhĂ©nanes Sur un fifre lointain un air de rĂ©giment Le mai le joli mai a parĂ© les ruines De lierre de vigne vierge et de rosiers Le vent du Rhin secoue sur le bord les osiers Et les roseaux jaseurs et les fleurs nues des vignes LA SYNAGOGUE Ottomar Scholem et Abraham Loeweren CoiffĂ©s de feutres verts le matin du sabbat Vont Ă la synagogue en longeant le Rhin Et les coteaux oĂč les vignes rougissent lĂ -bas Ils se disputent et crient des choses quâon ose Ă peine traduireBĂątard conçu pendant les rĂšgles ou Que le diable entre dans ton pĂšreLe vieux Rhin soulĂšve sa face ruisselante et se dĂ©tourne pour sourireOttomar Scholem et Abraham Loeweren sont en colĂšre Parce que pendant le sabbat on ne doit pas fumer Tandis que les chrĂ©tiens passent avec des cigares allumĂ©s Et parce quâOttomar et Abraham aiment tous deux Lia aux yeux de brebis et dont le ventre avance un peu Pourtant tout Ă lâheure dans la synagogue lâun aprĂšs lâautreIls baiseront la thora en soulevant leur beau chapeau Parmi les feuillards de la fĂȘte des cabanes Ottomar en chantant sourira Ă Abraham Ils dĂ©chanteront sans mesure et les voix graves des hommesFeront gĂ©mir un LĂ©viathan au fond du Rhin comme une voix dâautomneEt dans la synagogue pleine de chapeaux on agitera les loulabimHanoten ne Kamoth bagoim tholahoth baleoumim LES CLOCHES Mon beau tzigane mon amant Ăcoute les cloches qui sonnent Nous nous aimions Ă©perdument Croyant nâĂȘtre vus de personne Mais nous Ă©tions bien mal cachĂ©s Toutes les cloches Ă la ronde Nous ont vus du haut des clochers Et le disent Ă tout le monde Demain Cyprien et Henri Marie Ursule et Catherine La boulangĂšre et son mari Et puis Gertrude ma cousine Souriront quand je passerai Je ne saurai plus oĂč me mettre Tu seras loin Je pleurerai Jâen mourrai peut-ĂȘtre LA LORELEY Ă Jean SĂšve Ă Bacharach il y avait une sorciĂšre blonde Qui laissait mourir dâamour tous les hommes Ă la ronde Devant son tribunal lâĂ©vĂȘque la fit citer Dâavance il lâabsolvit Ă cause de sa beautĂ© Ă belle Loreley aux yeux pleins de pierreries De quel magicien tiens-tu ta sorcellerie Je suis lasse de vivre et mes yeux sont maudits Ceux qui mâont regardĂ© Ă©vĂȘque en ont pĂ©ri Mes yeux ce sont des flammes et non des pierreries Jetez jetez aux flammes cette sorcellerie Je flambe dans ces flammes ĂŽ belle Loreley Quâun autre te condamne tu mâas ensorcelĂ© ĂvĂȘque vous riez Priez plutĂŽt pour moi la Vierge Faites-moi donc mourir et que Dieu vous protĂšge Mon amant est parti pour un pays lointain Faites-moi donc mourir puisque je nâaime rien Mon cĆur me fait si mal il faut bien que je meure Si je me regardais il faudrait que jâen meure Mon cĆur me fait si mal depuis quâil nâest plus lĂ Mon cĆur me fit si mal du jour oĂč il sâen alla LâĂ©vĂȘque fit venir trois chevaliers avec leurs lances Menez jusquâau couvent cette femme en dĂ©mence Va-tâen Lore en folie va Lore aux yeux tremblants Tu seras une nonne vĂȘtue de noir et blanc Puis ils sâen allĂšrent sur la route tous les quatre La Loreley les implorait et ses yeux brillaient comme des astres Chevaliers laissez-moi monter sur ce rocher si haut Pour voir une fois encore mon beau chĂąteau Pour me mirer une fois encore dans le fleuve Puis jâirai au couvent des vierges et des veuves LĂ -haut le vent tordait ses cheveux dĂ©roulĂ©s Les chevaliers criaient Loreley Loreley Tout lĂ -bas sur le Rhin sâen vient une nacelle Et mon amant sây tient il mâa vue il mâappelle Mon cĆur devient si doux câest mon amant qui vient Elle se penche alors et tombe dans le Rhin Pour avoir vu dans lâeau la belle Loreley Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil SCHINDERHANNES Ă Marius-Ary Leblond Dans la forĂȘt avec sa bande Schinderhannes sâest dĂ©sarmĂ© Le brigand prĂšs de sa brigande Hennit dâamour au joli mai Benzel accroupi lit la Bible Sans voir que son chapeau pointu Ă plume dâaigle sert de cible Ă Jacob Born le mal foutu Juliette Blaesius qui rote Fait semblant dâavoir le hoquet Hannes pousse une fausse note Quand Schulz vient portant un baquet Et sâĂ©crie en versant des larmes Baquet plein de vin parfumĂ© Viennent aujourdâhui les gendarmes Nous aurons bu le vin de mai Allons Julia la mamâzelle Bois avec nous ce clair bouillon Dâherbes et de vin de Moselle Prosit Bandit en cotillon Cette brigande est bientĂŽt soĂ»le Et veut Hannes qui nâen veut pas Pas dâamour maintenant ma poule Sers-nous un bon petit repas Il faut ce soir que jâassassine Ce riche juif au bord du Rhin Au clair de torches de rĂ©sine La fleur de mai câest le florin On mange alors toute la bande PĂšte et rit pendant le dĂźner Puis sâattendrit Ă lâallemande Avant dâaller assassiner RHĂNANE DâAUTOMNE Ă Toussaint Luca Les enfants des morts vont jouer Dans le cimetiĂšre Martin Gertrude Hans et Henri Nul coq nâa chantĂ© aujourdâhui Kikiriki Les vieilles femmes Tout en pleurant cheminent Et les bons Ăąnes Braillent hi han et se mettent Ă brouter les fleurs Des couronnes mortuaires Câest le jour des morts et de toutes leurs Ăąmes Les enfants et les vieilles femmes Allument des bougies et des cierges Sur chaque tombe catholique Les voiles des vieilles Les nuages du ciel Sont comme des barbes de biques Lâair tremble de flammes et de priĂšres Le cimetiĂšre est un beau jardin Plein des saules gris et de romarins Il vous vient souvent des amis quâon enterre Ah ! que vous ĂȘtes bien dans le beau cimetiĂšre Vous mendiants morts saouls de biĂšre Vous les aveugles comme le destin Et vous petits enfants morts en priĂšre Ah ! que vous ĂȘtes bien dans le beau cimetiĂšre Vous bourgmestres vous bateliers Et vous conseillers de rĂ©gence Vous aussi tziganes sans papiers La vie vous pourrit dans la panse La croix nous pousse entre les pieds Le vent du Rhin ulule avec tous les hiboux Il Ă©teint les cierges que toujours les enfants rallument Et les feuilles mortes Viennent couvrir les morts Des enfants morts parlent parfois avec leur mĂšre Et des mortes parfois voudraient bien revenir Oh ! je ne veux pas que tu sortes Lâautomne est plein de mains coupĂ©es Non non ce sont des feuilles mortes Ce sont les mains des chĂšres mortes Ce sont tes mains coupĂ©es Nous avons tant pleurĂ© aujourdâhui Avec ces morts leurs enfants et les vieilles femmes Sous le ciel sans soleil Au cimetiĂšre plein de flammes Puis dans le vent nous nous en retournĂąmes Ă nos pieds roulaient des chĂątaignes Dont les bogues Ă©taient Comme le cĆur blessĂ© de la madone Dont on doute si elle eut la peau Couleur des chĂątaignes dâautomne LES SAPINS Les sapins en bonnets pointus De longues robes revĂȘtus Comme des astrologues Saluent leurs frĂšres abattus Les bateaux qui sur le Rhin voguent Dans les sept arts endoctrinĂ©s Par les vieux sapins leurs aĂźnĂ©s Qui sont de grands poĂštes Ils se savent prĂ©destinĂ©s Ă briller plus que des planĂštes Ă briller doucement changĂ©s En Ă©toiles et enneigĂ©s Aux NoĂ«ls bienheureuses FĂȘtes des sapins ensongĂ©s Aux longues branches langoureuses Les sapins beaux musiciens Chantent des noĂ«ls anciens Au vent des soirs dâautomne Ou bien graves magiciens Incantent le ciel quand il tonne Des rangĂ©es de blancs chĂ©rubins Remplacent lâhiver les sapins Et balancent leurs ailes LâĂ©tĂ© ce sont de grands rabbins Ou bien de vieilles demoiselles Sapins mĂ©decins divagants Ils vont offrant leurs bons onguents Quand la montagne accouche De temps en temps sous lâouragan Un vieux sapin geint et se couche LES FEMMES Dans la maison du vigneron les femmes cousentLenchen remplis le poĂȘle et mets lâeau du cafĂ©Dessus â Le chat sâĂ©tire aprĂšs sâĂȘtre chauffĂ©â Gertrude et son voisin Martin enfin sâĂ©pousent Le rossignol aveugle essaya de chanter Mais lâeffraie ululant il trembla dans sa cageCe cyprĂšs lĂ -bas a lâair du pape en voyageSous la neige â Le facteur vient de sâarrĂȘterPour causer avec le nouveau maĂźtre dâĂ©coleâ Cet hiver est trĂšs froid le vin sera trĂšs bonâ Le sacristain sourd et boiteux est moribondâ La fille du vieux bourgmestre brode une Ă©tole Pour la fĂȘte du curĂ© La forĂȘt lĂ -bas GrĂące au vent chantait Ă voix grave de grand orgue Le songe Herr Traum survint avec sa sĆur Frau SorgeKĂŠthi tu nâas pas bien raccommodĂ© ces basâ Apporte le cafĂ© le beurre et les tartinesLa marmelade le saindoux un pot de laitâ Encore un peu de cafĂ© Lenchen sâil te plaĂźtâ On dirait que le vent dit des phrases latinesâ Encore un peu de cafĂ© Lenchen sâil te plaĂźtâ Lotte es-tu triste Ă petit cĆur â Je crois quâelle aimeâ Dieu garde â Pour ma part je nâaime que moi-mĂȘmeâ Chut Ă prĂ©sent grandâmĂšre dit son chapeletâ Il me faut du sucre candi Leni je tousseâ Pierre mĂšne son furet chasser les lapins Le vent faisait danser en rond tous les sapinsLotte lâamour rend triste â Ilse la vie est douce La nuit tombait Les vignobles aux ceps tordus Devenaient dans lâobscuritĂ© des ossuaires En neige et repliĂ©s gisaient lĂ des suaires Et des chiens aboyaient aux passants morfondusIl est mort Ă©coutez La cloche de lâĂ©glise Sonnait tout doucement la mort du sacristainLise il faut attiser le poĂȘle qui sâĂ©teint Les femmes se signaient dans la nuit indĂ©cise Septembre 1901-Mai 1902. SIGNE Je suis soumis au Chef du Signe de lâAutomne Partant jâaime les fruits je dĂ©teste les fleurs Je regrette chacun des baisers que je donne Tel un noyer gaulĂ© dit au vent ses douleurs Mon Automne Ă©ternelle ĂŽ ma saison mentale Les mains des amantes dâantan jonchent ton sol Une Ă©pouse me suit câest mon ombre fatale Les colombes ce soir prennent leur dernier vol UN SOIR Un aigle descendit de ce ciel blanc dâarchangesEt vous soutenez-moi Laisserez-vous trembler longtemps toutes ces lampesPriez priez pour moi La ville est mĂ©tallique et câest la seule Ă©toileNoyĂ©e dans tes yeux bleus Quand les tramways roulaient jaillissaient des feux pĂąlesSur des oiseaux galeux Et tout ce qui tremblait dans tes yeux de mes songesï»żQuâun seul homme buvait Sous les feux de gaz roux comme la fausse orongeï»żĂ vĂȘtue ton bras se lovait Vois lâhistrion tire la langue aux attentivesï»żUn fantĂŽme sâest suicidĂ© LâapĂŽtre au figuier pend et lentement saliveï»żJouons donc cet amour aux dĂ©s Des cloches aux sons clairs annonçaient ta naissanceï»żVois Les chemins sont fleuris et les palmes sâavancentï»żVers toi LA DAME Toc toc Il a fermĂ© sa porte Les lys du jardin sont flĂ©tris Quel est donc ce mort quâon emporte Tu viens de toquer Ă sa porte Et trotte trotte Trotte la petite souris LES FIANĂAILLES Ă Picasso Le printemps laisse errer les fiancĂ©s parjures Et laisse feuilloler longtemps les plumes bleues Que secoue le cyprĂšs oĂč niche lâoiseau bleu Une Madone Ă lâaube a pris les Ă©glantines Elle viendra demain cueillir les giroflĂ©es Pour mettre aux nids des colombes quâelle destine Au pigeon qui ce soir semblait le Paraclet Au petit bois de citronniers sâenamourĂšrent Dâamour que nous aimons les derniĂšres venues Les villages lointains sont comme leurs paupiĂšres Et parmi les citrons leurs cĆurs sont suspendus Mes amis mâont enfin avouĂ© leur mĂ©pris Je buvais Ă pleins verres les Ă©toiles Un ange a exterminĂ© pendant que je dormais Les agneaux les pasteurs des tristes bergeries De faux centurions emportaient le vinaigre Et les gueux mal blessĂ©s par lâĂ©purge dansaient Ătoiles de lâĂ©veil je nâen connais aucune Les becs de gaz pissaient leur flamme au clair de lune Des croque-morts avec des bocks tintaient des glas Ă la clartĂ© des bougies tombaient vaille que vaille Des faux-cols sur des flots de jupes mal brossĂ©es Des accouchĂ©es masquĂ©es fĂȘtaient leurs relevailles La ville cette nuit semblait un archipel Des femmes demandaient lâamour et la dulie Et sombre sombre fleuve je me rappelle Les ombres qui passaient nâĂ©taient jamais jolies Je nâai plus mĂȘme pitiĂ© de moi Et ne puis exprimer mon tourment de silence Tous les mots que jâavais Ă dire se sont changĂ©s en Ă©toiles Un Icare tente de sâĂ©lever jusquâĂ chacun de mes yeux Et porteur de soleils je brĂ»le au centre de deux nĂ©buleuses Quâai-je fait aux bĂȘtes thĂ©ologales de lâintelligence Jadis les morts sont revenus pour mâadorer Et jâespĂ©rais la fin du monde Mais la mienne arrive en sifflant comme un ouragan Jâai eu le courage de regarder en arriĂšre Les cadavres de mes jours Marquent ma route et je les pleure Les uns pourrissent dans les Ă©glises italiennes Ou bien dans de petits bois de citronniers Qui fleurissent et fructifient En mĂȘme temps et en toute saison Dâautres jours ont pleurĂ© avant de mourir dans des tavernes OĂč dâardents bouquets rouaient Aux yeux dâune mulĂątresse qui inventait la poĂ©sie Et les roses de lâĂ©lectricitĂ© sâouvrent encore Dans le jardin de ma mĂ©moire Pardonnez-moi mon ignorance Pardonnez-moi de ne plus connaĂźtre lâancien jeu des vers Je ne sais plus rien et jâaime uniquement Les fleurs Ă mes yeux redeviennent des flammes Je mĂ©dite divinement Et je souris des ĂȘtres que je nâai pas créés Mais si le temps venait oĂč lâombre enfin solide Se multipliait en rĂ©alisant la diversitĂ© formelle de mon amour Jâadmirerais mon ouvrage Jâobserve le repos du dimanche Et je loue la paresse Comment comment rĂ©duire Lâinfiniment petite science Que mâimposent mes sens Lâun est pareil aux montagnes au ciel Aux villes Ă mon amour Il ressemble aux saisons Il vit dĂ©capitĂ© sa tĂȘte est le soleil Et la lune son cou tranchĂ© Je voudrais Ă©prouver une ardeur infinie Monstre de mon ouĂŻe tu rugis et tu pleures Le tonnerre te sert de chevelure Et tes griffes rĂ©pĂštent le chant des oiseaux Le toucher monstrueux mâa pĂ©nĂ©trĂ© mâempoisonne Mes yeux nagent loin de moi Et les astres intacts sont mes maĂźtres sans Ă©preuve La bĂȘte des fumĂ©es a la tĂȘte fleurie Et le monstre le plus beau Ayant la saveur du laurier se dĂ©sole Ă la fin les mensonges ne me font plus peur Câest la lune qui cuit comme un Ćuf sur le plat Ce collier de gouttes dâeau va parer la noyĂ©e Voici mon bouquet de fleurs de la Passion Qui offrent tendrement deux couronnes dâĂ©pines Les rues sont mouillĂ©es de la pluie de naguĂšre Des anges diligents travaillent pour moi Ă la maison La lune et la tristesse disparaĂźtront pendant Toute la sainte journĂ©e Toute la sainte journĂ©e jâai marchĂ© en chantant Une dame penchĂ©e Ă sa fenĂȘtre mâa regardĂ© longtemps MâĂ©loigner en chantant Au tournant dâune rue je vis des matelots Qui dansaient le cou nu au son dâun accordĂ©on Jâai tout donnĂ© au soleil Tout sauf mon ombre Les dragues les ballots les sirĂšnes mi-mortes Ă lâhorizon brumeux sâenfonçaient les trois-mĂąts Les vents ont expirĂ© couronnĂ©s dâanĂ©mones Ă Vierge signe pur du troisiĂšme mois Templiers flamboyants je brĂ»le parmi vous ProphĂ©tisons ensemble ĂŽ grand maĂźtre je suis Le dĂ©sirable feu qui pour vous se dĂ©voue Et la girande tourne ĂŽ belle ĂŽ belle nuit Liens dĂ©liĂ©s par une libre flamme Ardeur Que mon souffle Ă©teindra Ă Morts Ă quarantaine Je mire de ma mort la gloire et le malheur Comme si je visais lâoiseau de la quintaine Incertitude oiseau feint peint quand vous tombiez Le soleil et lâamour dansaient dans le village Et tes enfants galants bien ou mal habillĂ©s Ont bĂąti ce bĂ»cher le nid de mon courage CLAIR DE LUNE Lune mellifluente aux lĂšvres des dĂ©ments Les vergers et les bourgs cette nuit sont gourmands Les astres assez bien figurent les abeilles De ce miel lumineux qui dĂ©goutte des treilles Car voici que tout doux et leur tombant du ciel Chaque rayon de lune est un rayon de miel Or cachĂ© je conçois la trĂšs douce aventure Jâai peur du dard de feu de cette abeille Arcture Qui posa dans mes mains des rayons dĂ©cevants Et prit son miel lunaire Ă la rose des vents 1909 La dame avait une robe En ottoman violine Et sa tunique brodĂ©e dâor Ătait composĂ©e de deux panneaux Sâattachant sur lâĂ©paule Les yeux dansants comme des anges Elle riait elle riait Elle avait un visage aux couleurs de France Les yeux bleus les dents blanches et les lĂšvres trĂšs rouges Elle avait un visage aux couleurs de France Elle Ă©tait dĂ©colletĂ©e en rond Et coiffĂ©e Ă la RĂ©camier Avec de beaux bras nus Nâentendra-t-on jamais sonner minuit La dame en robe dâottoman violine Et en tunique brodĂ©e dâor DĂ©colletĂ©e en rond Promenait ses boucles Son bandeau dâor Et traĂźnait ses petits souliers Ă boucles Elle Ă©tait si belle Que tu nâaurais pas osĂ© lâaimer Jâaimais les femmes atroces dans les quartiers Ă©normes OĂč naissaient chaque jour quelques ĂȘtres nouveaux Le fer Ă©tait leur sang la flamme leur cerveau Jâaimais jâaimais le peuple habile des machines Le luxe et la beautĂ© ne sont que son Ă©cume Cette femme Ă©tait si belle Quâelle me faisait peur Ă LA SANTĂ I Avant dâentrer dans ma cellule Il a fallu me mettre nu Et quelle voix sinistre ulule Guillaume quâes-tu devenu Le Lazare entrant dans la tombe Au lieu dâen sortir comme il fit Adieu adieu chantante ronde Ă mes annĂ©es ĂŽ jeunes filles II Non je ne me sens plus lĂ Moi-mĂȘme Je suis le quinze de laOnziĂšme Le soleil filtre Ă traversLes vitres Ses rayons font sur mes versLes pitres Et dansent sur le papierJâĂ©coute Quelquâun qui frappe du piedLa voĂ»te III Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promĂšne Tournons tournons tournons toujours Le ciel est bleu comme une chaĂźne Dans une fosse comme un ours Chaque matin je me promĂšne Dans la cellule dâĂ cĂŽtĂ© On y fait couler la fontaine Avec les clefs quâil fait tinter Que le geĂŽlier aille et revienne Dans la cellule dâĂ cĂŽtĂ© On y fait couler la fontaine IV Que je mâennuie entre ces murs tout nusEt peints de couleurs pĂąles Une mouche sur le papier Ă pas menusParcourt mes lignes inĂ©gales Que deviendrai-je ĂŽ Dieu qui connais ma douleurToi qui me lâas donnĂ©e Prends en pitiĂ© mes yeux sans larmes ma pĂąleurLe bruit de ma chaise enchaĂźnĂ©e Et tous ces pauvres cĆurs battant dans la prisonLâAmour qui mâaccompagne Prends en pitiĂ© surtout ma dĂ©bile raisonEt ce dĂ©sespoir qui la gagne V Que lentement passent les heures Comme passe un enterrement Tu pleureras lâheure oĂč tu pleures Qui passera trop vitement Comme passent toutes les heures VI JâĂ©coute les bruits de la ville Et prisonnier sans horizon Je ne vois rien quâun ciel hostile Et les murs nus de ma prison Le jour sâen va voici que brĂ»le Une lampe dans la prison Nous sommes seuls dans ma cellule Belle clartĂ© ChĂšre raison Septembre 1911 AUTOMNE MALADE Automne malade et adorĂ© Tu mourras quand lâouragan soufflera dans les roseraies Quand il aura neigĂ© Dans les vergers Pauvre automne Meurs en blancheur et en richesse De neige et de fruits mĂ»rs Au fond du ciel Des Ă©perviers planent Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines Qui nâont jamais aimĂ© Aux lisiĂšres lointaines Les cerfs ont bramĂ© Et que jâaime ĂŽ saison que jâaime tes rumeurs Les fruits tombant sans quâon les cueille Le vent et la forĂȘt qui pleurent Toutes leurs larmes en automne feuille Ă feuilleï»żLes feuillesï»żQuâon fouleï»żUn trainï»żQui rouleï»żLa vieï»żSâĂ©coule HĂTELS La chambre est veuve Chacun pour soi PrĂ©sence neuve On paye au mois Le patron doute Payera-t-on Je tourne en route Comme un toton Le bruit des fiacres Mon voisin laid Qui fume un Ăącre Tabac anglais Ă La ValliĂšre Qui boite et rit De mes priĂšres Table de nuit Et tous ensemble Dans cet hĂŽtel Savons la langue Comme Ă Babel Fermons nos portes Ă double tour Chacun apporte Son seul amour CORS DE CHASSE Notre histoire est noble et tragique Comme le masque dâun tyran Nul drame hasardeux ou magique Aucun dĂ©tail indiffĂ©rent Ne rend notre amour pathĂ©tique Et Thomas de Quincey buvant Lâopium poison doux et chaste Ă sa pauvre Anne allait rĂȘvant Passons passons puisque tout passe Je me retournerai souvent Les souvenirs sont cors de chasse Dont meurt le bruit parmi le vent VENDĂMIAIRE Hommes de lâavenir souvenez-vous de moi Je vivais Ă lâĂ©poque oĂč finissaient les rois Tour Ă tour ils mouraient silencieux et tristes Et trois fois courageux devenaient trismĂ©gistes Que Paris Ă©tait beau Ă la fin de septembre Chaque nuit devenait une vigne oĂč les pampres RĂ©pandaient leur clartĂ© sur la ville et lĂ -haut Astres mĂ»rs becquetĂ©s par les ivres oiseaux De ma gloire attendaient la vendange de lâaube Un soir passant le long des quais dĂ©serts et sombres En rentrant Ă Auteuil jâentendis une voix Qui chantait gravement se taisant quelquefois Pour que parvint aussi sur les bords de la Seine La plainte dâautres voix limpides et lointaines Et jâĂ©coutai longtemps tous ces chants et ces cris QuâĂ©veillait dans la nuit la chanson de Paris Jâai soif villes de France et dâEurope et du monde Venez toutes couler dans ma gorge profonde Je vis alors que dĂ©jĂ ivre dans la vigne Paris Vendangeait le raisin le plus doux de la terre Ces grains miraculeux qui aux treilles chantĂšrent Et Rennes rĂ©pondit avec Quimper et Vannes Nous voici ĂŽ Paris Nos maisons nos habitants Ces grappes de nos sens quâenfanta le soleil Se sacrifient pour te dĂ©saltĂ©rer trop avide merveille Nous tâapportons tous les cerveaux les cimetiĂšres les muraillesCes berceaux pleins de cris que tu nâentendras pas Et dâamont en aval nos pensĂ©es ĂŽ riviĂšres Les oreilles des Ă©coles et nos mains rapprochĂ©es Aux doigts allongĂ©s nos mains les clochers Et nous tâapportons aussi cette souple raison Que le mystĂšre clĂŽt comme une porte la maison Ce mystĂšre courtois de la galanterie Ce mystĂšre fatal fatal dâune autre vie Double raison qui est au delĂ de la beautĂ© Et que la GrĂšce nâa pas connue ni lâOrient Double raison de la Bretagne oĂč lame Ă lame LâocĂ©an chĂątre peu Ă peu lâancien continent Et les villes du Nord rĂ©pondirent gaĂźment Ă Paris nous voici boissons vivantes Les viriles citĂ©s oĂč dĂ©goisent et chantent Les mĂ©talliques saints de nos saintes usines Nos cheminĂ©es Ă ciel ouvert engrossent les nuĂ©es Comme fit autrefois lâIxion mĂ©canique Et nos mains innombrables Usines manufactures fabriques mains OĂč les ouvriers nus semblables Ă nos doigts Fabriquent du rĂ©el Ă tant par heure Nous te donnons tous cela Et Lyon rĂ©pondit tandis que les anges de FourviĂšres Tissaient un ciel nouveau avec la soie des priĂšres DĂ©saltĂšre toi Paris avec les divines paroles Que mes lĂšvres le RhĂŽne et la SaĂŽne murmurent Toujours le mĂȘme culte de sa mort renaissant Divise ici les saints et fait pleuvoir le sang Heureuse pluie ĂŽ gouttes tiĂšdes ĂŽ douleur Un enfant regarde les fenĂȘtres sâouvrir Et des grappes de tĂȘtes Ă dâivres oiseaux sâoffrir Les villes du Midi rĂ©pondirent alors Noble Paris seule raison qui vis encore Qui fixes notre humeur selon ta destinĂ©e Et toi qui te retires MĂ©diterranĂ©e Partagez-vous nos corps comme on rompt des hosties Ces trĂšs hautes amours et leur danse orpheline Deviendront ĂŽ Paris le vin pur que tu aimes Et un rĂąle infini qui venait de Sicile Signifiait en battement dâailes ces paroles Les raisins de nos vignes on les a vendangĂ©s Et ces grappes de morts dont les grains allongĂ©s Ont la saveur du sang de la terre et du sel Les voici pour ta soif ĂŽ Paris sous le ciel Obscurci de nuĂ©es famĂ©liques Que caresse Ixion le crĂ©ateur oblique Et oĂč naissent sur la mer tous les corbeaux dâAfrique Ă raisins Et ces yeux ternes et en famille Lâavenir et la vie dans ces treilles sâennuyent Mais oĂč est le regard lumineux des sirĂšnes Il trompa les marins quâaimaient ces oiseaux-lĂ Il ne tournera plus sur lâĂ©cueil de Scylla OĂč chantaient les trois voix suaves et sereines Le dĂ©troit tout Ă coup avait changĂ© de face Visages de la chair de lâonde de tout Ce que lâon peut imaginer Vous nâĂȘtes que des masques sur des faces masquĂ©es Il souriait jeune nageur entre les rives Et les noyĂ©s flottant sur son onde nouvelle Fuyaient en le suivant les chanteuses plaintives Elles dirent adieu au gouffre et Ă lâĂ©cueil Ă leurs pĂąles Ă©poux couchĂ©s sur les terrasses Puis ayant pris leur vol vers le brĂ»lant soleil Les suivirent dans lâonde oĂč sâenfoncent les astres Lorsque la nuit revint couverte dâyeux ouverts Errer au site oĂč lâhydre a sifflĂ© cet hiver Et jâentendis soudain ta voix impĂ©rieuse Ă Rome Maudire dâun seul coup mes anciennes pensĂ©es Et le ciel oĂč lâamour guide les destinĂ©es Les feuillards repoussĂ©s sur lâarbre de la croix Et mĂȘme la fleur de lys qui meurt au Vatican MacĂšrent dans le vin que je tâoffre et qui a La saveur du sang pur de celui qui connaĂźt Une autre libertĂ© vĂ©gĂ©tale dont tu Ne sais pas que câest elle la suprĂȘme vertu Une couronne de trirĂšgne est tombĂ©e sur les dalles Les hiĂ©rarques la foulent sous leurs sandales Ă splendeur dĂ©mocratique qui pĂąlit Vienne la nuit royale oĂč lâon tuera les bĂȘtes La louve avec lâagneau lâaigle avec la colombe Une foule de rois ennemis et cruels Ayant soif comme toi dans la vigne Ă©ternelle Sortiront de la terre et viendront dans les airs Pour boire de mon vin par deux fois millĂ©naire La Moselle et le Rhin se joignent en silence Câest lâEurope qui prie nuit et jour Ă Coblence Et moi qui mâattardais sur le quai Ă Auteuil Quand les heures tombaient parfois comme les feuilles Du cep lorsquâil est temps jâentendis la priĂšre Qui joignait la limpiditĂ© de ces riviĂšres Ă Paris le vin de ton pays est meilleur que celui Qui pousse sur nos bords mais aux pampres du nord Tous les grains ont mĂ»ri pour cette soif terrible Mes grappes dâhommes forts saignent dans le pressoir Tu boiras Ă longs traits tout le sang de lâEurope Parce que tu es beau et que seul tu es noble Parce que câest dans toi que Dieu peut devenir Et tous mes vignerons dans ces belles maisons Qui reflĂštent le soir leurs feux dans nos deux eaux Dans ces belles maisons nettement blanches et noires Sans savoir que tu es la rĂ©alitĂ© chantent ta gloire Mais nous liquides mains jointes pour la priĂšre Nous menons vers le sel les eaux aventuriĂšres Et la ville entre nous comme entre des ciseaux Ne reflĂšte en dormant nul feu dans ses deux eaux Dont quelque sifflement lointain parfois sâĂ©lance Troublant dans leur sommeil les filles de Coblence Les villes rĂ©pondaient maintenant par centaines Je ne distinguais plus leurs paroles lointaines Et TrĂšves la ville ancienne Ă leur voix mĂȘlait la sienne Lâunivers tout entier concentrĂ© dans ce vin Qui contentait les mers les animaux les plantes Les citĂ©s les destins et les astres qui chantent Les hommes Ă genoux sur la rive du ciel Et le docile fer notre bon compagnon Le feu quâil faut aimer comme on sâaime soi-mĂȘme Tous les fiers trĂ©passĂ©s qui sont un sous mon front LâĂ©clair qui luit ainsi quâune pensĂ©e naissante Tous les noms six par six les nombres un Ă un Des kilos de papier tordus comme des flammes Et ceux-lĂ qui sauront blanchir nos ossements Les bons vers immortels qui sâennuient patiemment Des armĂ©es rangĂ©es en bataille Des forĂȘts de crucifix et mes demeures lacustres Au bord des yeux de celle que jâaime tant Les fleurs qui sâĂ©crient hors de bouches Et tout ce que je ne sais pas dire Tout ce que je ne connaĂźtrai jamais Tout cela tout cela changĂ© en ce vin pur Dont Paris avait soif Me fut alors prĂ©sentĂ© Actions belles journĂ©es sommeils terribles VĂ©gĂ©tation Accouplements musiques Ă©ternelles Mouvements Adorations douleur divine Mondes qui vous ressemblez et qui nous ressemblez je vous ai bu et ne fus pas dĂ©saltĂ©rĂ© Mais je connus dĂšs lors quelle saveur a lâunivers Je suis ivre dâavoir bu tout lâunivers Sur le quai dâoĂč je voyais lâonde couler et dormir les bĂ©landres Ăcoutez-moi je suis le gosier de Paris Et je boirai encore sâil me plaĂźt lâunivers Ăcoutez mes chants dâuniverselle ivrognerie Et la nuit de septembre sâachevait lentement Les feux rouges des ponts sâĂ©teignaient dans la Seine Les Ă©toiles mouraient le jour naissait Ă peine
Paroles de la chanson Merci... pour tout merci papa par Michel Sardou C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. On est dans l'coup papa, Et jusqu'au cou. Toi tu t'envoies en l'air Et nous voilĂ sur terre. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup . Vous direz Ă mes filles, quand elles auront quinze ans, Qu'elles sont nĂ©es un jour d'un Ă©clat de printemps. Leur maman Ă©tait belle et j'en avais envie Mais le ciel m'est tĂ©moin que je n'ai rien promis. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. On est dans l'coup papa, Et jusqu'au cou. Toi tu t'envoies en l'air Et nous voilĂ sur terre. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. Vous direz Ă mes filles, quand elles auront quinze ans, De se mĂ©fier des hommes qui leur disent en chantant Des paroles d'argent pour atteindre leur cĆur Et font en mĂȘme temps le geste du semeur. C'est un beau coup papa, Un coup de trop. Coucou et nous voilĂ , AnnĂ©e zĂ©ro. Toi tu as disparu Au premier coin de rue. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. Vous direz Ă mes filles, si vous les rencontrez, De bien jouir de la vie que je leur ai donnĂ©e, De jouer Ă tous les jeux et surtout Ă l'amour, Et d'oublier demain pour le bonheur du jour. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. On est dans l'coup papa, Et jusqu'au cou. Toi tu t'envoies en l'air Et nous voilĂ sur terre. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup. C'est un beau coup papa, Un coup de trop. Coucou et nous voilĂ , AnnĂ©e zĂ©ro. Toi tu as disparu Au premier coin de rue. C'est un beau coup papa, Merci beaucoup.
Tu m'avais dit "Pour le printemps Je t'offrirai un bel enfant" Nous Ă©tions fous, nous Ă©tions deux Qu'il Ă©tait doux d'ĂȘtre amoureux Avec l'automne, les feuilles se sont fanĂ©es C'est en hiver que c'est arrivĂ©. Tu conduisais vite, la route Ă©tait verglacĂ©e Je crois qu'il neigeait, tu m'as quittĂ©. On s'Ă©tait dit "C'est pour la vie" Je porte encore ton anneau d'or J'aimerais crier, ne plus pleurer Ca sert Ă quoi ? Jamais tu ne reviendras. ParlĂ© Oh mon Amour, mon tendre Amour Ce soir encore je suis tout seul, un peu perdu. ĂpinglĂ©e sur le mur de notre chambre, en face de mon lit Il y a ta derniĂšre lettre, un peu froissĂ©e. Je la connais par coeur Voix de femme, parlĂ© Mon ChĂ©ri, cet enfant que je t'avais promis pour le printemps, Tu sais, nous l'appellerons ClĂ©ment. Je suis folle de joie, je pars ce soir Demain je serai dans tes bras, je t'aime Avec l'automne, les feuilles se sont fanĂ©es C'est en hiver que c'est arrivĂ©. Tu conduisais vite, la route Ă©tait verglacĂ©e Je crois qu'il neigeait, tu m'as quittĂ© Mais je ne t'oublie pas Paroles2Chansons dispose dâun accord de licence de paroles de chansons avec la SociĂ©tĂ© des Editeurs et Auteurs de Musique SEAM
Tristes mots si touchants, Ramon Pipin rend hommage sur Facebook Ă son camarade Costric Ier forcĂ©ment trop tĂŽt disparu. Nous nâoublierons jamais ses royales dĂ©connadesâŠRIP ! Triste nouvelle⊠Notre Grandissime Costric Ier sâen est allĂ©, nous laissant orphelins de son HumanitĂ©, de son Humour, de son Impertinence et de sa LibertĂ©. Jâaurais eu le privilĂšge de crĂ©er avec lui le groupe Odeurs, partageant ainsi des instants de crĂ©ativitĂ© miraculeux et inoubliables. AprĂšs avoir fourni au Bonheur des dames quelques-unes de ses chansons-phare Laura, LâĂźle du bonheur nous avions dĂ©cidĂ© de cisailler les barbelĂ©s de la censure pour accoucher dâun premier album dont le merveilleux motto costriquien Ă©tait Odeurs frĂŽle le bon goĂ»t sans jamais y sombrer ». Et ouch ! Sur cet album figurent une version martiale de I want to hold your hand », le duo Ă©rotico-culinario-gainsbourien de Douce crĂšme », la complainte de lâhyper-viril Gros snob », lâhymne nationalo-dĂ©bilo-delpechien Youpi la France » sans oublier Je suis mou », Ode au printemps » le brĂ»lot fĂ©ministe chantĂ© par cette cantatrice meurtriĂšre, ChĂšque baby chĂšque » sur le mercantilisme de lâindustrie musicale, lâanarcho-punkitude de Sex-bazooka » et lâĂ©ternel Vilain petit zoziau » dont je ne comprends toujours pas quâil ne fasse pas partie du patrimoine obligĂ© des chorales enfantines. Toutes ces chansons sont le fruit de lâimagination sans limites de Costric, je ne mâoccupais alors que de la partie musicale. Il sâembarqua ensuite dans lâĂ©criture dâun opĂ©ra-rock Tommy Lobo » qui faillit devenir notre 2Ăšme album mais dont le sens mâĂ©chappe encore aujourdâhui et donc nous revĂźnmes Ă un format plus traditionnel ? avec 1980 No sex ». Et lĂ on ne pouvait plus arrĂȘter la bĂȘte !! Un chef-dâĆuvre avis personnel Couscous boulettium », y voisine avec des titres tels La viande de porc », Le stade nasal », Astrid », Lâhomme-objet » ou Quitte ou double » et La santĂ© par les plantes » ainsi que Rock Haroun Tazieff » oĂč lâauteur aborde des sujets majeurs tels les risques nuclĂ©aires, la nĂ©crophilie, la schizophrĂ©nie, la psychanalyse, le machisme etc. Il a mĂȘme Ă©crit une chanson sur les salsifis⊠Câest dire si canaliser une telle dĂ©bauche crĂ©ative nâĂ©tait pas toujours chose zĂ©zĂ©e. Aujourdâhui encore, le sens profond de certaines paroles mâĂ©chappe et je nâaurai pas eu lâoccasion de lui demander des Ă©claircissements. Je cite » Si dans chaque homme y a un porc latent, dans chaque port y a une femme qui attend, dans chaque homme il y a donc une femme, le port de la jaquette est obligatoire ». Nous sommes sur une planĂšte lointaine⊠Ses incursions anti-totalitaires allaient Ă©galement nous donner droit Ă deux chansons inĂ©dites Le miĂšvre et la torture » pour le spectacle de Bobino en 80 et Les nouveaux Russes blancs » que nous jouions sur scĂšne Ă lâOlympia en 81. Il parlait lĂ de la sexualitĂ© outre-Mur et du procĂšs dâun pauvre moujik ayant pratiquĂ© des actes contre nature. Je ne rĂ©siste pas au plaisir dâen citer quelques extraits Jâai Ă©pousĂ© en Moldavie, Une Ă©tudiante en psychiatrie, Une vraie Russe non dĂ©colorĂ©e, Ses poils au blinis lâon prouvĂ©, Elle sâappelle Camarade Tania, Une sacrĂ©e paire de nichonska⊠⊠Je me suis autocritiquĂ©, Je ne suis quâun bourgeois tarĂ©, Jâavoue, je suis Ćdipe lui-mĂȘme, Jâai pratiquĂ© tous les blasphĂšmes, Oui, jâai couchĂ© avec ma mĂšre Et bien sĂ»r que jâai tuĂ© mon pĂšre ! Aaaaaaaahhhh⊠⊠Camarade Docteur a raison, Je suis en voie de guĂ©rison, Et bien attachĂ© dans mon lit, Je hurle Travail, Famille, Parti ! » Ă Russie, terre dâasile dâaliĂ©nĂ©s, Le fil de la pensĂ©e est barbelé⊠Refrain Allons Ă Kaboul Soigner les mabouls, Pour le KGB, Et chez les Afghans, Soigner les dĂ©ments Pour le KGB. » VoilĂ . Sur scĂšne, Rita Ă©tait cachĂ© dans un poste de tĂ©lĂ© pour espionner ce contrevenant et Esno dans un lampadaire. Que de souvenirs Ă©patants⊠Alors repose-toi bien Costric, tu mâauras ouvert lâesprit et fait mĂ»rir. Que des voix aujourdâhui telles que la tienne sâĂ©lĂšvent pour nous faire rire, la tienne me manquera. En revanche, jâaurais dorĂ©navant la chance de ne plus goĂ»ter ta cuisine immonde. Une derniĂšre anecdote Un soir oĂč Clarabelle et moi-mĂȘme Ă©tions invitĂ©s Ă dĂźner, tu nous avais servi un truc genre gratin de maroilles » ou autre. devant tant de finesse culinaire, je tâavais demandĂ© dâoĂč tu tenais la recette et tu mâavais rĂ©pondu le plus sĂ©rieusement du monde CâĂ©tait dans Paris Boum-Boum » hebdo gratuit de petites annonces parisien des annĂ©es 80. AmĂšne⊠Ramon Pipin
chanson tu m avais dit pour le printemps